OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Le gotha des medias se réunit pour parler du web payant http://owni.fr/2010/11/10/le-gotha-des-medias-se-reunit-pour-parler-du-web-payant/ http://owni.fr/2010/11/10/le-gotha-des-medias-se-reunit-pour-parler-du-web-payant/#comments Wed, 10 Nov 2010 17:02:12 +0000 StreetPress http://owni.fr/?p=35206 Article de Johan Weisz initialement publié sur StreetPress sous le titre “À Avignon le gotha des medias et de l’entertainment veut passer du gratuit au payant quitte a vendre Kant comme du yaourt”

Avignon (84) - « Il faut aider ces braves gens ». C’est Maurice Lévy qui lance cette incantation au micro, alors que 400 têtes suivent du regard le patron de Publicis, qui marche au centre de la Salle du Conclave du Palais des Papes. Ces « braves gens » ? Les Bertelsmann (M6, RTL Group, Freemantle) ou autres Vivendi (Canal+, SFR, Universal, Activision) et Viacom (MTV, Paramount, Dreamworks) qui se retrouvent depuis 3 ans pour un week-end au Forum d’Avignon, sorte de Davos des médias, de la communication et de la culture.

« Aider ces braves gens », donc… à faire du business. Car les industriels de la culture continuent à s’agacer devant The Pirate Bay, et se disent qu’ils ont manqué un train en lorgnant du côté de Spotify. Pendant tout un après-midi, ils ont prêché le passage du « gratuit au payant » – plus exactement :

Comment est-ce qu’on peut faire aussi attractif que le gratuit (…) mais en le faisant payer ? dixit Alain Sussfeld, le directeur général d’UGC, en mode marketeur fou

Les gourous du business digital à la barre

L’après-midi intitulée « du gratuit au payant » se lance avec un film de promo pour le micro-paiement. Et Bruno Perrin, associé chez Ernst & Young, cravate bleue (c’est le dresscode à Avignon cette année) et costard noir, embraye en expliquant combien les médias doivent « reprendre le contrôle sur les prix et sur les marges ». Le consultant tente un effort de vulgarisation qui part en sucette :

Je ne sais pas si ça va devenir fashionable de payer… Mais ne pas payer va devenir ringard… Euh… en tout cas, il va falloir que payer devienne fashionable.

Le micro-paiement, un allôpass like pour le mobile

Les premières pistes de l’après-midi : Le micro-paiement et le téléphone mobile (« l’instrument idéal pour la monétisation des contenus », selon Vincent de la Bachelerie de Ernst & Young), le développement de « médias de services de masse » (« si les gens ne sont plus prêts à payer pour un contenu, ils peuvent être prêts à payer pour un service »… c’est l’info on demand) et pour cela, explique le consultant d’Ernst & Young… « s’appuyer sur des entreprises comme Publicis pour développer la stratégie marketing et les nouvelles politiques organisationnelles » (Parenthèse LOL : Publicis est le « producer » du Forum d’Avignon, qui a commandé l’étude Ernst & Young).

En même temps qu’on prend ce cours de business digital, on rigole bien avec Maurice Lévy (cravate bleue) et Hartmut Ostrowki, le PDG de Bertelsmann (cravate bleue à losanges), quand Maurice se remémore la soirée passée ensemble « chez quelqu’un de vraiment très pauvre… devinez qui ? Bill Gates ».

« Il ne faut pas que ça soit compliqué pour le client de dépenser son argent »

La blague ayant fait son effet, seconde salve de recommandations, avec le PDG allemand de Bertelsmann : « Pour réussir dans l’environnement numérique, il ne suffit pas de présenter les vieux contenus dans un nouvel emballage ». Non, il faut proposer des « contenus uniques et exclusifs », mais aussi « faciles à utiliser » : « Il ne faut pas que ça soit compliqué pour le client de dépenser son argent ». Message reçu cinq sur cinq.

Un forum sur le numérique, mais pas trop quand même

Là où le Forum d’Avignon nous laisse dubitatif, c’est qu’on n’est pas certain que les grands décideurs qui se penchent sur les mutations de l’ère numérique aient tout saisi : Pas de Twitter ou de Facebook pour un Forum consacré cet année aux « nouveaux accès et nouveaux usages à l’ère numérique ». La connexion wifi lague à mort dans la salle de conférence, impossible de tweeter depuis son PC.

Et les doctorants de l’Insead ou de la London School of Economics et la cinquantaine d’autres étudiants invités devront rester entre eux pendant les principaux moments d’interactions (cocktails, repas, etc.)… comme si on n’avait pas réalisé que les digital natives qui sont passés de eMule à Spotify, tout en restant allergiques à Hadopi, c’était eux !

Clash générationnel

Et c’est vrai aussi que quand le philosophe marocain Bensalem Himmich en remet une couche au micro contre les jeunes et la gratuité, ça sent le clash générationnel (à se demander si son exhortation porte sur la fin de la gratuité ou la fin des jeunes) :

« Il ne faut plus parler de gratuité, maintenant il faut en finir, les jeunes profitent de cartes pour le théâtre, le cinéma…. », s’énerve le philosophe.

Les groupes médias renforcés

Les industries des médias avaient voulu nous faire flipper (le piratage menacerait les fondements du système) mais ici, au Forum d’Avignon, on assure au contraire que

« la valorisation boursière des entreprises de média a beaucoup augmenté » ces derniers mois (Hartmut Ostrowki).

L’industrie traditionnelle des contenus protégée par des barrières à l’entrée

Le PDG de Vivendi Jean-Bernard Lévy (cravate bleue à rayures) est quant à lui convaincu que les gros acteurs de l’industrie des contenus ont peu de choses à craindre : elles sont de plus en plus protégées par des « barrières à l’entrée de plus en plus élevées » : Canal+ et son demi milliard investi chaque année dans les droits des retransmissions du sport et le cinéma, ou les coûts de développement d’un jeu vidéo, entre 30 et 40 millions d’euros… « On va vers des modèles dominants », assure Jean-Bernard Lévy

Le patron de Bertelsmann « croit dans l’avenir des grands »

Du côté de Bertelsmann, Hartmut Ostrowki juge que « la menace que fait peser l’internet sur la télévision n’est pas si grande : les 25 – 35 ans regardent aujourd’hui plus la TV que les 15 – 25 ans il y a 10 ans. Les gens découvrent de plus en plus la TV en vieillissant ».

Surtout, la « concentration des médias est croissante », assure-t-il : Par exemple, dans l’édition numérique où les best-sellers l’emporteraient largement sur la longue traîne ou même pour l’entertainment en ligne : « Les 10 shows télévisés les plus populaires aux Etats-Unis représentent 5% de l’audience à la télévision, contre 20% sur Internet… cette concentration est une opportunité »… Et Ostrowski de reprendre un peu plus tard : « Je crois dans l’avenir des grands, des forts, des grandes marques ».

Bref tout va bien et « les gens consomment Kant comme du yaourt »

Le directeur général du groupe Le Figaro reprend la balle au bon : « Les sites des quotidiens se sont imposés et sont très loin devant les sites des pure players [les sites d’information non issus d’un média traditionnel, ndlr] qui sont très loin derrière », s’enthousiasme Francis Morel, rejoint par Maurice Lévy :

« les “pure players”… moi je parlerais plutôt d’”outsiders” ».

À Avignon, les patrons des grands groupes médias sont formels : tout va bien.

Et la conclusion revient à Maurice Lévy :

« Le numérique ce sont des tuyaux qui démocratisent l’accès aux biens (…) et donc les mettent à la portée des gens quel que soient l’usage qu’ils en fassent. Et si les gens consomment Kant comme du yaourt, ce n’est pas très grave.

>> Article initialement publié sur StreetPress

>> Source: A Avignon, Johan Weisz

>> Illustration FlickR CC : Leonard John Matthews

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Testons les caméras de surveillance de Levallois-Perret http://owni.fr/2010/11/03/testons-les-cameras-de-surveillance-de-levallois-perret/ http://owni.fr/2010/11/03/testons-les-cameras-de-surveillance-de-levallois-perret/#comments Wed, 03 Nov 2010 16:50:27 +0000 StreetPress http://owni.fr/?p=34084 Titre original : On a testé les caméras de surveillance de Levallois-Perret

A Levallois-Perret 50 caméras scrutent en permanence la voie publique. Retrouveront-elles Samba et Géraldine déguisés en Pom-Pom girl ? « Ah ouais, ça devrait se voir ça ! » s’esclaffe un policier. Top chrono !

Bertrand Mayer, le Monsieur sécurité de Levallois

Jeudi 26 août – 17h32. Lunettes Ray-Ban très 60’s , costard sombre distingué et teint légèrement hâlé, Bertrand Mayer – adjoint au maire de Levallois-Perret – nous accueille au commissariat de police municipale à l’angle des rues Anatole France et Kléber. 10 jours plus tôt, le ministre de l’Industrie Christian Estrosi s’était fendu d’une sortie remarquée dans la presse où il remettait en question les maires qui n’avaient pas doté leur ville d’un système de vidéo-surveillance. A Levallois – champion du genre – StreetPress a voulu savoir qui se cachait derrière Big Bother … Et combien de temps il mettrait pour appréhender Samba et Géraldine en train de perturber la voix publique avec des poms-poms de cheerleader.

Des prouesses hi-tech dignes de 24h Chrono

« Au PC » – le petit nom du très officiel « Centre de Surveillance Urbain » – M. Carpentier et Gérard (les noms des deux policiers municipaux ont été modifiés à leur demande) ont remplacé Jack Bauer et Tony Almeida . La salle vidéo du commissariat de Levallois-Perret a un petit coté CAT , les mètres carrés en moins. Mais coté high-tech, pas grand chose à lui envier: Le mur d’écran affiche 12 vidéos en simultané, les policiers orientent à distance des caméras à 360 degrés et zooment en un clic pour repérer une crotte de chien étalée sur un trottoir.

Regardez ! Voyez comment l’image se floute dès que vous tentez de regarder au travers d’une fenêtre.

« Montrez-lui le ‘floutage’ M. Carpentier » ordonne fièrement l’adjoint de M. Balkany, Bertrand Mayer. « Regardez ! Voyez comment l’image se floute dès que vous tentez de regarder au travers d’une fenêtre. » L’effet est saisissant: Après avoir zoomé sur plus de 300 mètres, l’image sur l’écran de contrôle se crypte façon Canal +, au moment où l’on croit reconnaître le visage d’une jolie blonde installée dans son salon. On est rassuré: « Big Brother » Mayer ne peut pas nous voir tout nu sous la douche grâce à « ce système qui protège la vie privée ».

2 agents pour 50 caméras

M. Mayer est l’adjoint au maire Patrick Balkany mais aussi « le délégué à la Sécurité publique, à la Sécurité civile et aux questions de Défense » (sic). Un titre a rallonge révélateur de la fierté qu’accorde la mairie à son système de vidéo-surveillance. « C’est vrai que d’autres mairies viennent nous demander conseil » répond-il, visiblement ravi qu’on lui pose la question.

Dans Levallois-Perret, 50 caméras filment en permanence balayant plus de 90% de la ville. Deux policiers municipaux – parmi les 80 agents de la ville – sont affectés aléatoirement « au PC » qui centralise les images. Ils scrutent le mur d’écran pendant des permanences de 9h en alternant: l’un s’occupe du standard tandis que l’autre observe la ville. « Comme ça, moi j’appelle les collègues dès qu’on remarque quelque chose », explique l’agent Carpentier, tout en caressant sa moustache.

« Quand on n’a pas l’œil, ce n’est pas évident »

Que remarquent-ils ? « Des attroupements à la sortie du lycée », réfléchit l’agent Carpentier. Son collègue renchérit: « Quand il y a des manifestations étudiantes aussi. On essaie de cibler ». Et les gens qui urinent dans la rue ? « Personne n’urine dans la rue à Levallois » répondent-ils le plus sérieusement du monde. L’adjoint au maire M. Mayer se félicite lui, d’avoir pu suivre depuis « le PC » un voleur à la tire jusqu’au 17ème arrondissement de Paris. Il y a eu aussi « ces Roms qui dévalisaient les horodateurs ». M. Mayer reprend l’agent Carpentier: « On va éviter d’être polémique hein … Ce n’était pas des Roms ». Le policier se rattrape: « On va dire que c’était des étrangers alors ».

Mais de l’aveu même des agents municipaux: « Quand on n’a pas l’œil, ce n’est pas évident ». Difficile en effet de repérer un fait précis parmi le magma d’information, surtout qu’il n’existe pas de système d’alerte en cas de détection d’un incident. « Thalès développe un système qui puisse nous prévenir en cas d’augmentation du niveau sonore », révèle Mayer. En attendant, tout se fait à l’œil nu.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Partie de cache-cache avec Big Brother

18h11: Les policiers relèvent le défi quand on leur propose de chronométrer le temps qu’ils mettront à retrouver deux journalistes de StreetPress. Samba et Géraldine, aisément identifiables par les poms-poms jaunes de cheerleader qu’ils agitent, sont placés sur une avenue fréquentée de Levallois. « Allez on y va », s’enthousiasme Bertrand Mayer, sous le regard sceptique de son attachée de presse: « Vous êtes sur que nous avons les autorisations ?».

Les policiers Gérard et Carpentier jouent le jeu à fond. Les caméras pivotent, zooment, alternent pendant que les souris glissent sur les tapis. M. Mayer est à l’affut, les yeux rivés sur le mur d’écrans. « Comment sont vos amis ? », demande t-il. « C’est un jeune homme noir et une jolie blonde, avec des ustensiles de pom-pom girl » je réponds. M. Carpentier se marre: «  Ah ouais, ça devrait se voir ça ! ».

18h17: « Faut nous dire dans quelle zone ils se trouvent aussi ! » demande un des deux agents. Après 6 minutes, la partie de cache-cache commence à sentir la loose pour la police. La tension est palpable. Pour les aider, Samba et Géraldine nous apprennent par téléphone qu’ils sont à proximité d’un métro. « Ça ne peut être que ‘métro de Pont de Levallois’ ! », s’impatiente un des policiers. Mais autour du métro Pont de Levallois toujours rien. « Ils sont peut-être masqués par des feuillages », tente M. Mayer. « Et puis il y a trois caméras qui ne fonctionnent pas », ajoute Gérard, qui contredit involontairement l’adjoint au maire. Celui-ci affirmait quelques minutes plus tôt qu’aucune camera ne servait de leurre … Silence pesant.

Levallois: Géraline et Samba essaient d’attirer l’attention de la caméra de surveillance qui se trouve juste en face d’eux

13 minutes: le temps qu’il a fallu pour retrouver Samba et Géraldine

La police recherche deux individus suspects armés de poms-poms

18h23: Samba et Géraldine ont enfin été alpagués après que nous ayons informés les policiers qu’ils se trouvaient au métro Anatole France. « On va leur envoyer une équipe pour trouble à l’ordre public ! », vanne M. Mayer. M. Carpentier répond du tac-o-tac: « Pour la fille surtout ! Elle fait du racolage ! » L’atmosphère se détend: « Allez on envoie un scooter! », s’exclame Gérard, plutôt amusé par notre petit manège.

Les policiers jouent à la caméra-cachée en dépêchant un collègue non averti du stratagème sur les lieux du faux incident. Sauf que celui entre en trombe dans le PC: il ne trouve pas les clefs pour démarrer son scooter. La blague tombe à l’eau. Le jeune policier va quand même interpeller Samba et Géraldine: « Des gens se sont plaints que vous faisiez peur aux automobilistes » leur reproche t-il. « Quels gens ? » se défendent les deux journalistes.

Un gadget de riches

Géraldine prise en flag’ de cheerleading intempestif

De l’aveu même de M. Mayer, c’était comme « chercher une aiguille dans une botte de foin ». Le chef de la vidéo-surveillance à Levallois-Perret est formel: pour être efficace, il faut « cibler» les délits contre lesquels lutter. « A Orléans par exemple, ils ont installé une vingtaine de caméras pour protéger des bâtiments qui se faisaient couvrir de graffitis. L’année suivante, ils n’ont eut que 100.000 euros de dégâts. » (Lire aussi: L’efficacité de la vidéo-protection: un sujet polémique)

Mais à Levallois quelle est la cible des caméras de surveillance ? Hormis les attroupements à la sortie du lycée évoqués plus haut par les policiers, M. Mayer explique qu’il s’agit avant tout d’un outil « généraliste », pour prévenir par exemple de « la chute d’une vieille dame », « d’un incendie » ou « d’une voiture mal-garée qui bloque la circulation ». Apparemment rien de très ciblé … Et surtout, pas sûr que les caméras avertiraient les services de police plus rapidement qu’un bon vieux coup de fil.

« De toute façon on ne peut pas quantifier l’impact de la vidéo-surveillance isolée des autres moyens de la Police Municipale. Ce n’est qu’un outil », avance M. Mayer quand on lui demande d’évaluer la rentabilité du système. Un « gadget de riche » ? Il ne s’oppose pas à cette définition. « Mais c’est le travail du maire de faire le maximum pour garantir la sécurité dans sa ville. Et le verdict tombe tous les 7 ans ».

L’attaque à la voiture-bélier de mars 2010

Mais malgré toute sa technologie, le système de vidéo-surveillance de Levallois ne dissuade pas les malfrats: En mars 2010 un distributeur de la BNP a été attaqué à la voiture-bélier. L’instruction est en cours et selon l’adjoint au maire ce sont les images de vidéastes amateurs autant que les vidéos de la police, qui ont permis de constituer un dossier. Pour M. Mayer c’est la preuve que « la menace vidéo vient plus des gens qu’on ne contrôle pas que de la police, soumise à des règles de déontologie. » On pourrait répondre que cela montre aussi les limites de l’efficacité du système de vidéo-surveillance.

Article initialement publié sur StreetPress

Source: Robin D’Angelo avec Géraldine et Samba
Crédits photos: Mathieu pour StreetPress

Image de une : Elsa Secco pour OWNI

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