OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 C’est quoi l’équation idéale pour vendre sa musique? http://owni.fr/2011/03/03/cest-quoi-lequation-ideale-pour-vendre-sa-musique/ http://owni.fr/2011/03/03/cest-quoi-lequation-ideale-pour-vendre-sa-musique/#comments Thu, 03 Mar 2011 12:11:42 +0000 Anastasia Levy http://owni.fr/?p=30627 Anastasia Levy, peut-être plus connue pour certains sous le pseudo de @jokerwoman, est diplômée de l’école de journalisme de Strasbourg. Elle est l’auteur de plusieurs articles sur OWNImusic dont les très bonnes interview de Christian Scott et Nina Kinert. Elle prête notamment sa plume au magazine Usbek & Rica et tant d’autres. Elle nous offre aujourd’hui un petit bilan de ses observations sur l’industrie musicale. Comment font-ils pour s’en sortir, ces artistes? A chacun sa formule.

L’expérience de Radiohead

En 2007, Radiohead avait eu l’air de proposer le meilleur modèle possible pour vendre son album, In Rainbows. Le pay-what-you-want, un système avec lequel tout le monde était gagnant, sauf les maisons de disques, pointées comme des exploiteurs d’art, faisant leur beurre sur le dos des artistes et du public. Alors que tout le monde avait salué cette démarche, à part quelques commentateurs n’y voyant que le côté commercial, Radiohead remet tout en cause en ce début d’année et propose son nouvel album à un prix fixe. Ou à des prix fixes plutôt. Les internautes doivent dépenser au moins 7 € pour télécharger huit titres en mp3, jusqu’à 39 € pour un mystérieux futur « newspaper album » et dès à présent les titres en .wav. Thom Yorke avait prévenu dès 2008 (interview dans The Hollywood Reporter) que la distribution d’In Rainbows était une réponse unique à une situation particulière (après leur bataille pour se séparer d’EMI), mais tout le monde autour martelait (par ici ou par là) que ça avait été particulièrement bénéfique pour eux, au moins par les retombées externes à l’album (concerts, réputation, impact même de l’album sur l’industrie de la musique). Radiohead revient aujourd’hui dessus, expliquant que c’est une « progression logique ».

Mais de logique, personne ne peut parler aujourd’hui, dans l’industrie de la musique. Chacun y va de son innovation plus ou moins intéressée/intéressante, mais aucun modèle ne s’impose finalement. Alors que se développent difficilement des lieux de rencontre et de dialogue pour les acteurs qui veulent se poser la question de l’évolution de ce marché (voir, par exemple, le bilan de MusicNet.works) la tendance est encore à l’opposition, du simple mépris aux procès qui durent des années (majors contre plateformes de téléchargement, majors contre artistes, artistes contre plateformes, et même pire, artistes contre public).

Ce n’est évidemment pas parce que Radiohead l’a abandonné que le pay-what-you-want est mort. Si le groupe d’Oxford est le poil à gratter des majors, Nine Inch Nails est leur cauchemar. Pas question pour le groupe de repasser à une autre formule que le pay-what-you-want pour le groupe de Trent Reznor qui avait, à l’époque où ils étaient chez Universal, appelé leurs fans à voler leurs albums, et fait l’apologie du site de « piratage » Oink.

Le DIY et le crowdfunding

Ce système ne marche pas, comme on pourrait le croire, qu’avec des groupes déjà bien installés. Il a récemment permis à de petits groupes de faire le buzz autour de leur premier album, comme les excellents Yellow Ostrich, qui proposent de « name your price » pour télécharger l’album en numérique : « Download it for free, or pay-what-you-want, its your choice ». Forts de leur démarche, qui prend plutôt bien, ils placent sur leur bandcamp un lien vers Kickstarter, site de financement par les internautes sur lequel ils proposent d’investir dans… la production de leur album en vinyl. Le groupe n’a donc rien déboursé pour leur album physique : pour qu’il soit produit, il fallait que les internautes investissent (sans retour sur investissement possible, à part un cadeau déterminé à l’avance) au moins 2500 $, objectif atteint en quelques semaines. Ca fait rêver, tant la simplicité de la démarche a propulsé sa réussite.

Le côté pratique des majors

Et pourtant, même pour les jeunes groupes, la signature sur un gros label reste un des premiers objectifs. Frida Hyvonen nous confiait récemment que sa signature chez Universal Publishing, après trois albums en production et distribution indépendantes, était un soulagement : plus d’argent et donc plus de temps pour créer et pour enregistrer. C’est effectivement encore là que les moyens de production sont concentrés, et que les artistes sont chouchoutés. On comprend ainsi que les gros, type Daft Punk ou Dr Dre ne cherchent pas à se séparer de ceux qui leur offrent sécurité et visibilité (voire matraquage médiatique).
Et le rapport de force s’inverse : les maisons de disques signent aujourd’hui des contrats qui bénéficient plus aux artistes qu’avant. Les labels sont devenus les employés des artistes.

Par ailleurs, les majors ont développé ou racheté des labels spécialisés ou indie, comme Blue note (label jazz d’Herbie Hancock ou John Coltrane) chez EMI, ou Nonesuch chez Warner, qu’ils tiennent à bout de bras. Besoin d’une caution artistique ? Peut-être, mais personne ne peut nier que c’est bénéfique pour les artistes. Mais…aussi pour les majors, qui évitent ainsi de prendre les risques nécessaires à la vitalité du monde musical. Au lieu de produire des artistes non calibrés pour le marché, elles exploitent les catalogues de ceux qui ont pris ces risques.

Des labels qui pèsent

De trop rares exemples prouvent que la signature sur un label indé n’empêche pas un tel succès : Arcade Fire, sur Merge records, connaît un succès phénoménal, tandis que récemment Vampire Weekend, sur XL’s recordings, voyait son album Contra devenir n°1 des charts albums aux Etats-Unis. XL ne sort pourtant que…six albums par an, et signe un nouvel artiste par an : le choix de l’hyper-spécialisation. Richard Russell, le PDG du label confiait au Guardian : « On refuse 200 000 démos par an. En gros, on dit non à tout, et même à plein de grands artistes. Il faut une dose de courage pour faire ça. C’est une philosophie anti-commerciale ». Russell évite les dépenses inutiles (des clips ? pour quoi faire…) et ne dépense jamais plus que ce qu’il a… Un modèle simple et payant.

Certains musiciens refusent encore de traiter les questions bassement matérielles de distribution et de se poser même la question de l’avenir de l’industrie dans laquelle ils vivent. Est-ce déshonorant de parler d’autre chose que d’art ? Ceux qui le font sont en général attaqués là-dessus (voyez les dizaines de critiques de Radiohead…), alors que ça ne suppose absolument pas de mettre de côté l’aspect musical.
Toute l’industrie de la musique s’agite depuis une dizaine d’années déjà pour savoir quel modèle ressortira vainqueur du séisme de la gratuité. Mais la réponse sera peut-être dans l’hétérogénéité, chaque groupe définissant son modèle personnel comme une partie de sa personnalité.

Crédits photos CC flickr : dunechaser, dullhunk, superde1uxe

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MyMajorCompany : la fin de l’histoire ? http://owni.fr/2010/11/24/mymajorcompany-la-fin-de-lhistoire/ http://owni.fr/2010/11/24/mymajorcompany-la-fin-de-lhistoire/#comments Wed, 24 Nov 2010 14:25:21 +0000 Romain Péchard http://owni.fr/?p=28295 Article écrit par Romain Péchard, associé de The Persuaders, cabinet conseil en stratégies web. Il a été publié sur le site Tech Crunch France. romain Péchard écrit également sur le site Weqli.com.

MyMajorCompany a fait rêver toute la sphère web lors de son lancement en décembre 2007. Après 3 ans d’existence, 32 artistes produits dont un devenu grand public (Grégoire) et un autre en passe de le devenir (Joyce Jonathan), il ne fait malheureusement plus rêver. Autoproclamé “label musical communautaire” sur le fondement qu’il permet à qui veut d’investir dans la production d’un artiste, ce label d’un genre nouveau lors de son lancement s’est rapidement rangé dans la liste des labels standard, seul le modèle économique étant légèrement différent.

Après avoir surfé sur la vague des Arctic Monkeys et autres groupes comme Ok Go ayant vu leur notoriété exploser grâce à MySpace ou Youtube, le modèle fondé sur la production communautaire semble prendre du plomb dans l’aile avec des résultats plus que médiocres… et voir arriver des concurrents qui pourraient bien enterrer pour de bon ce modèle.

Phénomène de mode. Jeu d’argent et rêve. Sans les fans.

Après avoir été un phénomène de mode, les labels communautaires ont pour la plupart fermé par incapacité à trouver un artiste capable de rapidement être grand public comme Grégoire, artiste signé chez MyMajorCompany. Mais aussi par incapacité à produire une véritable valeur ajoutée pour les visiteurs de ces sites qui se retrouvent bien souvent confrontés à des artistes très formatés. La promesse de produire de nouveaux artistes, et par “nouveau” entendez différents, n’est pas tenue. Joyce Jonathan et Grégoire sont de bons exemples du formatage musical.

Car ce modèle de label ne se repose pas sur la prise de risque mais l’investissement de particuliers qui espèrent bien gagner de l’argent après le lancement de stars, comme cela a pu être le cas avec l’artiste Grégoire. La direction artistique peut être faite en amont par une pré-sélection de l’entreprise, comme il fait chez MyMajorCompany, mais ce sont les investisseurs qui décident de produire tel ou tel artiste, sans connaissance artistique ni expertise du milieu musical. Ce qui fait qu’ils vont investir dans des artistes qui ressemblent à ce qu’ils aiment actuellement, empêchant alors cet artiste de sortir du lot car bloqué par la star du moment.

La faiblesse de ce modèle réside donc dans la notion du particulier qui prend le rôle d’expert et qui investit dans des artistes qui ressemblent à des artistes grand public. Mais ce qui est le plus dangereux pour MyMajorCompany est le fait que l’entreprise ne prend pas en compte la relation avec les fans et la force de ces derniers pour faire émerger de véritables révélations, le véritable moteur qui fait de Youtube le plus grand découvreur de talents au niveau mondial.

Pas une aide aux fans ou aux artistes mais une aide aux producteurs et maisons de disque.

Mais le véritable point qui a fait chuter les entreprises sur le modèle de MyMajorCompany, et qui en fera tomber d’autres dans des domaines différents, est la découverte du pot aux roses : ces sites soit-disant “communautaires” avec pour objectif d’aider les artistes ne sont que des sites permettant de réduire la prise de risque du label de production. En effet le label est payé quoiqu’il arrive, puis il prend la part du lion si l’artiste sort du lot, et éventuellement il reverse de une partie marginale de l’argent gagné sur la vente de CDs aux investisseurs.

Cette mécanique ne produit donc pas de résultat valable, sauf dans les rares cas où les directeurs artistiques des grandes maisons de disque ont raté un artiste qui passe alors sur ce réseau alternatif pour être subventionné par un label secondaire. Avant de reprendre l’ascenseur vers les grandes maisons de disque via l’accord entre MyMajorCompany et Warner Music. Un véritable circuit de récupération généré par l’industrie musicale et soutenu par des particuliers qui jouent au directeur artistique au lieu de jouer au boursicoteur.

Le modèle MyMajorCompany ne répond pas au besoin des artistes (trouver leur public) ou à celui des audiences (découvrir de nouveaux artistes) mais à celui des labels (faire baisser la prise de risque) et des maisons de disque (réintégrer rapidement les artistes oubliés dans le circuit traditionnel). Mais surtout il ne crée pas la valeur qui peut aider cette industrie à prendre avantage de l’Internet pour aller de l’avant.

L’avenir : Mass market vs Long Tail ?

La problématique de la production est une fausse problématique. Il est possible de produire son album à prix très réduit sans avoir recours à des services du type MyMajorCompany. L’enjeu pour les artistes n’est plus alors de produire, il est de se confronter, de se faire connaître et reconnaître par son public. Official.fm, startup suisse, semble aujourd’hui bien placé dans ce registre, bien que loin derrière les Youtube, Facebook et MySpace. Ce qui supprime irrémédiablement tout intérêt à MyMajorCompany.

Mais les véritables concurrents de MyMajorCompany ne sont pas ces mastodontes ou les startups qui tentent de percer dans les sites communautaires sur le thème de la musique. Ce sont les entreprises qui vont être capables d’aider les artistes à générer plus de revenus. Et dans ce domaine les startups comme BandCamp qui facilite la vente de produits dérivés, LiveStream ou Awdio qui permet de diffuser des événements en live sur Internet sont pour le moment bien placé pour devenir les partenaires à la fois des maisons de disque que des artistes en devenir.

Dans un modèle où la production n’est pas un souci, où la diffusion ne l’est plus non plus, tout se jouera sur la capacité des artistes et des maisons de disques à rester en contact avec son public et fournir du contenu fréquemment pour ne pas être oublié et remplacé par un autre. L’avenir ne sera pas un débat entre mass market et long tail mais reposera sur la capacité à produire des contenus inédits et nouveaux qui pourront être vendus aux fans.

Article initialement publié sur Tech Crunch France

Crédits photos : FlickR CC louisvolant; Steve Crane

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ProPublica: journalisme à (très) haut coût, financé par des dons http://owni.fr/2010/11/18/propublica-journalisme-a-tres-haut-cout-finance-par-des-dons/ http://owni.fr/2010/11/18/propublica-journalisme-a-tres-haut-cout-finance-par-des-dons/#comments Thu, 18 Nov 2010 11:00:53 +0000 Benoit Raphaël http://owni.fr/?p=36079 Difficile de parler des nouveaux modèles économiques des médias sans parler de ProPublica.

Même s’il parait difficilement applicable en France, il passionne autant qu’il pose de nombreuses questions.

Son fondateur, Paul Steiger (ancien directeur de la rédaction du Wall Street Journal, ci-contre), était invité aux Assises du journalisme de Strasbourg, hier, où j’étais présent, pour brosser devant un parterre de professionnels et d’étudiants fascinés, un modèle unique au monde.

Fascinant, le modèle de ProPublica l’est forcément : ce pure player américain fait du journalisme d’intérêt général, dans la plus pure tradition de l’investigation à l’américaine. Un journalisme que l’on ne connaît pas, ou peu, en France, où ce que l’on appelle “l’enquête”, se résume bien souvent à donner suite à des informations fournies par des sources intéressées à faire sortir telle ou telle affaire.

Le journalisme de ProPublica coûte cher. “Plusieurs de nos investigations ont nécessité jusqu’à deux ans de travail”, précise Paul Steiger.

L’enquête réalisée sur les hôpitaux de la Nouvelle-Orléans au moment du passage de Katrina, qui a reçu le prix Pulitzer cette année, (une première), a demandé un travail de plusieurs mois et publié sur plus de soixante feuillets, a coûté la bagatelle de 400.000 dollars (300.000 euros), rappelle Rue89.

300.000 euros, des sommes que l’on peut retrouver en télé, où les budgets ne sont pas les mêmes, jamais en presse écrite.

ProPublica, c’est une rédaction de trente-deux journalistes, dont huit prix Pulitzer. Depuis 2008, date de la création du site Internet ProPublica, rappelle le quotidien régional Les dernières Nouvelles d’Alsace le média a réalisé “138 enquêtes publiées dans trente-huit médias différents”. Et ces journalistes sont parfois des techniciens. Car ProPublica fait aussi dans le journalisme de données, c’est-à-dire un journalisme qui recoupe des données disponibles pour les mettre en scène et révéler de nouvelles informations. Par exemple ici, ce travail remarquable sur les labos qui paient les docteurs pour promouvoir leurs médicaments. Les données sont publiées par ProPublica et mises à disposition de toutes les rédactions des États-Unis. Chaque média local a la possibilité de récupérer les données de sa région et d’enquêter pour écrire ses propres histoires autour.  Un journalisme qui implique une hybridation du métier. Être technicien ne suffit pas pour croiser les données, il faut savoir passer des coups de fil, recouper les infos et les contextualiser. “Nos codeurs et analystes data ont beau avoir des diplômes d’ingénieurs, ce sont des journalistes”, rappelle Paul Steiger.

Combien ça coûte ? 10 millions de dollars par an. Le modèle économique ? Il n’y en a pas. Enfin, pas exactement. ProPublica est entièrement financé par des dons. 10 millions de dons par an. 70% en provenance d’un seul donateur, la famille Sandler. Ce qui n’est pas sans poser des questions sur l’indépendance à moyen terme. Ainsi, Paul Steiger cherche-t-il à diversifier ses donateurs.

Conséquence inédite de ce modèle d’intérêt public, ces enquêtes très coûteuses sont publiées en Creative Commons, c’est-à-dire qu’elles peuvent être reprises ou ré-exploitées par d’autres médias (sélectionnés par ProPublica).

Aux États-Unis, le système du mécénat par les fondations est très répandu. Difficile à imaginer en France. Chez nous, c’est plutôt le modèle de l’aide de l’État qui prime. Ce qui ne favorise ni le dynamisme, ni ce genre d’initiative.

Selon Paul Steiger, en dehors des dons, “il n’y a pas de modèle économique pour le journalisme d’investigation à (très) haut coût”. Il est pourtant indispensable au fonctionnement d’une démocratie. À méditer.

Billet initialement publié sur La Social NewsRoom

Image CC Flickr BillRhodesPhoto et luca.sartoni

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Le « journalisme augmenté » en 10 points http://owni.fr/2010/11/07/le-%c2%ab-journalisme-augmente-%c2%bb-en-10-points/ http://owni.fr/2010/11/07/le-%c2%ab-journalisme-augmente-%c2%bb-en-10-points/#comments Sun, 07 Nov 2010 19:34:40 +0000 Eric Scherer http://owni.fr/?p=33769 1 – Le journalisme augmenté de l’audience

Les insurgés ont pris la parole ! La prise de contrôle des moyens de production et de distribution des médias traditionnels par ceux qui en étaient privés (seule révolution marxiste réussie à ce jour !) entraîne la démocratisation de l’écriture et met fin au journalisme de surplomb, au journalisme de magistère. Elle permet aussi le « crowdsourcing » (collecte d’informations et témoignage sont partagés avec le public) et le « crowdfunding » (le financement aussi). Les médias parlent aux médias !

2 – Le journalisme augmenté de ses pairs

Lâcher prise sur ses contenus et laisser les contenus extérieurs entrer. Les rédactions, souvent conservatrices, ont de moins en moins une mentalité de bunker et s’ouvrent davantage au reste du monde, voire à leurs concurrents. Les collaborations entre médias se multiplient. Le journalisme en réseau et le journalisme mutualisé ont un bel avenir.

3 – Le journalisme augmenté des liens

Les métadonnées et l’hypertexte permettent le journalisme de liens, le journalisme de tri sélectif, le journalisme dépollueur, le news jockey ! Celui qui choisit, guide, réduit l’infobésité, trouve le signal dans le bruit.

4 – Le journalisme augmenté des autres corps de métiers

Visualisation de données, journalisme de données, journalisme visuel, web documentaires, web reportage, etc. Autant de nouvelles formes de narration qui associent le travail des designers, des développeurs et des journalistes. Ceux qui réussiront à faire travailler ensemble ces corps de métiers prendront de l’avance.

5 – Le journalisme augmenté d’innovation et de nouvelles technologies

Le journalisme web n’est pas la mise en ligne des contenus des journaux ou des télévisions. Une écriture différente est indispensable pour être en prise avec les nouveaux usages de la révolution de l’information. La chance est aussi d’y pouvoir profiter des nouveaux outils. Pour ce mode de représentation du réel, le digital storytelling de demain, le récit numérique, comprend déjà la géolocalisation, la cartographie animée, la réalité augmentée, la 3D, etc.

6 – Le journalisme augmenté de valeur ajoutée

Context is King ! Savoir relier les faits : face à la banalisation croissante de l’information, la valeur est dans la mise en perspective rapide des faits. Non seulement, collecter, éditer, hiérarchiser et distribuer ne suffit plus, mais il faut désormais aussi analyser les informations avec un degré de vitesse, jusqu’ici réservé aux seuls factuels. Les journalistes traditionnels font une erreur s’ils croient que leur capacité à collecter et à organiser les faits continuera à les rendre indispensables.

Pour rester pertinent, il ne suffit plus en outre de donner les informations de la veille ou du jour même, connus de tous, mais d’offrir du contexte, de la perspective, de l’analyse pour aider le public à saisir l’importance des événements, pour lui et la société, à regarder de l’avant, à anticiper la suite.

Il faut enrichir l’information, de manière éditoriale et technologique.

7 – Le journalisme augmenté du packaging

Les beaux médias ! La forme, c’est le fond qui remonte à la surface ! (Victor Hugo). C’est aussi la qualité de l’accès au contenu qui fera la différence.

Dans une économie de l’attention, où l’abondance des contenus a remplacé leur rareté, le temps de cerveau disponible sera de plus en plus dur à capter et à conserver ! Soigner le design de l’information devient crucial. D’autant que se multiplient aussi les nouveaux supports et plateformes de distribution (smartphones, tablettes, encre électronique …).

8 – Le journalisme augmenté de formations, de nouveaux métiers et d’entrepreneuriat

Pas facile d’apprendre à faire du vélo à 50 ans ! Mais il faut s’y mettre et se former. La révolution de l’information n’attend pas. D’autant que de nouveaux profils sont apparus ces dernières années dans les petites annonces : les journaux, magazines ou télévisions recherchent aussi désormais des éditeurs de métadonnées, des éditeurs spécialisés en moteur de recherche, des community managers, des journalistes visuels, des agrégateurs, des remixeurs, des facilitateurs, etc.

La facilité de créer une unité éditorial pour un coût initial presque nul (plus besoin d’imprimerie, de camions pour livrer les journaux ou de stations de TV) incite déjà ceux qui ont de bonnes idées à passer à l’acte et à monter leur média, seul ou en petit groupe.

9 – Le journalisme augmenté d’expérimentations

Difficile de faire désormais sans une cellule de R&D, un médialab, pour répondre à la vitesse des changements dans la profession et profiter des opportunités offertes par les nouvelles technologies. Restera à tester les nouvelles idées et à prendre des risques sans être tétanisé par la crainte de l’échec. Vive le bêta !

10 – Le journalisme augmenté de la confiance

C’est la mission la plus difficile, mais la plus importante dans une société où la défiance envers les corps constitués croît à toute vitesse.

Images CC Elsa Secco et Flickr Matthew Clark Photography & Design

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Paroles de conflits: exemple de crowdfunding appliqué au journalisme http://owni.fr/2010/10/15/paroles-de-conflits-exemple-de-crowdfunding-applique-au-journalisme/ http://owni.fr/2010/10/15/paroles-de-conflits-exemple-de-crowdfunding-applique-au-journalisme/#comments Fri, 15 Oct 2010 13:11:40 +0000 Julien Goetz http://owni.fr/?p=31677 C’est quasiment une ligne droite, tout au long du 39ième parallèle, de Srebrenica à Hiroshima, un fil tendu pour recueillir des bribes de récits, raconter ce qu’est l’humain au cœur des conflits qui agitent encore (et toujours) notre continent eurasien. Raphaël Beaugrand, ex-journaliste pour lepoint.fr, en est le funambule. Perché sur son vélo, il s’est lancé le 3 mars dernier à l’assaut des 16000 kms qui séparent ces deux villes tristement célèbres pour l’atrocité de la guerre qu’elles représentent. Déjà plus de 8 mois en roue libre pour tenter de donner une mémoire au présent.

Actuellement en Chine, il roule en direction la province du Xinjiang où la minorité Ouighoure subit l’oppression du régime de Pékin depuis plusieurs années. En tout, Raphaël traversera 16 pays, dont 8 seront vraiment au cœur du webdocumentaire final “Paroles de conflits” : Bosnie-Herzégovine, Moldavie, Ukraine, Géorgie, Azerbaïdjan, Chine, Corée du Sud et Japon. Un neuvième récit était prévu en Ouzbékistan mais l’extrême tension sur place l’a finalement poussé à faire l’impasse sur ce sujet. Retour en France prévu pour Noël si tout se passe comme prévu.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Le levier du crowdfunding

Avec 70 à 80 interviews par pays, des moments de vie, des instants suspendus en “no comment” et une semaine passée à vivre au plus près des populations – directement chez l’habitant – à chaque étape, la masse d’images et de témoignages que récolte actuellement Raphaël Beaugrand est impressionnante, déjà plus de 120 heures de rushs et l’aventure n’est pas terminée. Un projet gigantesque qui a besoin de moyens pour exister.

Depuis le début, Raphaël est soutenu par FatCat Films, une jeune maison de production qui, après 5 ans d’existence, se lance dans l’aventure du documentaire avec un conviction totale. La richesse de la matière récoltée sur le terrain pousse Antoine Cayrol, co-fondateur de FatCat Films, imaginer un documentaire transmédias qui pourrait se décliner à la fois sur le web (avec le soutien de mediastroika) mais aussi en version carnet de route pour supports mobiles et une version plus traditionnelle en vue d’une diffusion TV. L’envie est une chose, la réalité des finances en est une autre, d’où l’idée d’Antoine Cayrol d’utiliser le levier du crowdfunding pour aider au financement du projet.

C’est notre premier documentaire et l’on sait, par expérience, que l’on ne nous fais pas confiance comme ça, du premier coup [ndlr : dans les réseaux traditionnels de financement]. Le court-métrage, on en a fait quelques uns, maintenant je sais que l’on peut avoir des aides, des diffuseurs, parce qu’on en a déjà fait trois ou quatre qui ont marché. J’ai quand même fait les démarches pour le docu mais sans succès. Donc on a choisi de lancer la production et le tournage grâce à un peu de trésorerie que l’on avait de côté et je me suis dit :  “ceux qui vont pouvoir me faire confiance sans que l’on ai fait d’autres docus avant, ce sont les internautes”, d’où l’idée de tenter le crowdfunding.

Et cela fonctionne plutôt bien jusqu’ici. Le projet, lancé sur la plateforme KissKissBankBank depuis un peu plus de 90 jours, a déjà récolté près de 11.000 euros grâce à 134 donateurs. Les dons posés par les internautes tournent en moyenne autour de 60 euros jusqu’à un généreux mécène (resté anonyme) qui a fait un don de 1000 euros. En échange de son soutien financier, chaque “KissBanker” sera à minima crédité au générique et recevra en plus des bonus particuliers en fonction du montant soumis (du poster dédicacé au vélo de l’aventure). Mais la démarche des internaute est sans doute plus motivée par le projet en lui-même et le désir de le voir se concrétiser que par ces quelques “récompenses”.

Petites structures et projets d’envergure

La production étant déjà entamée et la première partie de cette aventure, celle du terrain, étant plus proche de sa conclusion que de son lancement, à quoi va servir ce financement ? Ce ne sont pas les postes qui manquent selon Antoine Cayrol :

Ça va déjà servir à construire l’aventure web, vu que le site devrait coûter à peu près 30.000 euros. Ça va servir également à payer tous les traducteurs, vu qu’il en faut un pour chacun des pays. Ça servira bien sûr aussi sur la post-production, principalement pour payer la monteuse qui va travailler sur le projet.

Ce que l’exemple de “Paroles de Conflits” permet de bien comprendre, c’est que ce nouvel outil de financement qu’est le crowdfunding ne signifie pas nécessairement qu’il faille se passer des réseaux habituels de la production, bien au contraire. C’est un très bon outil complémentaire pour permettre à des petites productions de prendre de l’envergure et de se permettre d’imaginer des projets plus ambitieux. Si les 18.000 euros annoncés sur KissKissBankBank pour ce projet sont atteints, ils seront également un retour sur investissement pour FatCat Films.

Le principe (pourtant logique) que la maison de production puisse récupérer une partie des frais engagés par le biais de ce financement pourrait en choquer certains mais c’est une réalité économique. Le crowdfunding permet concrètement à une petite structure comme FatCat Films de développer un projet important sans mettre en péril sa survie, ce qui n’aurait aucun sens. Bien au contraire, en venant soutenir la prise de risque initiale, les internautes offrent à la fois une réalité au projet et également une rentabilité à la structure qui le porte et qui pourrait donc être amenée à en porter d’autre du même type.

L’horizon des 18.000 euros

Tout cela se conjugue pour l’instant au conditionnel. Il reste en effet 16 jours à compter d’aujourd’hui avant la fin de l’opération de crowdfunding sur KissKissBankBank et près de 7000 euros à trouver pour atteindre l’objectif des 18000 euros. Si l’objectif n’est pas atteint au terme du délais, tous les KissBankers récupèrent leur mise et Antoine Cayrol devra repartir en quête de nouvelles pistes de financements.

Pendant ce temps, Raphaël Beaugrand continue de sillonner les routes sur la trace du 39ème parallèle, sur la trace de ces conflits qui ne sont pas si éloignés qu’on le croit et des marques qu’ils impriment dans les êtres. Ça serait dommage que ce projet ne voit pas le jour et que ces voix qui nous racontent restent muettes.

Pour aller plus loin : le projet sur KissKissBankBank, sa page FaceBook et son blog sur webdocu.fr.

http://dai.ly/aeTedV
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Les débuts du crowdsourcing appliqué au journalisme http://owni.fr/2010/10/12/spot-us-glifpix-jaime-info-les-debuts-du-crowdsourcing-applique-au-journalisme/ http://owni.fr/2010/10/12/spot-us-glifpix-jaime-info-les-debuts-du-crowdsourcing-applique-au-journalisme/#comments Tue, 12 Oct 2010 13:09:00 +0000 Capucine Cousin http://owni.fr/?p=31337 Cofinancer les reportages et sujets d’investigation qu’il aimerait lire: le rêve de tout lecteur, un journalisme sur mesure qui est en train de prendre ses marques. Et auquel se greffent de nouveaux pure players de l’information.

Depuis maintenant deux ans, sur sa plateforme participative, la start-up américaine Spot.US , comme on en parlait ici, propose aux internautes de soutenir financièrement des idées de reportages qu’ils aimeraient lire, soumises sur le site par des journalistes indépendants. Ou comment le crowdfunding (levée de petites sommes d’argent auprès d’internautes), appliqué au domaine culturel, s’étend au journalisme.

Son fondateur, le journaliste David Cohn, est venu parler de son concept devant une poignée de journalistes, lors d’une masterclass organisée lundi par Citizenside et le World Editors Forum.

Reportages à la demande

Le concept, donc : comme ces sites musicaux où les internautes peuvent plébisciter et financer en ligne, et donc permettre aux artistes de se faire produire par des internautes (tel MyMajorCompany), SpotUS propose aux internautes de choisir le sujet d’article (leur story favorite) qui les intéresse le plus, parmi les propositions de sujets présentés sur le site par des journalistes freelance. Du journalisme à la demande, en somme : « Dans un resto, si le serveur décide de ce que vous allez manger, vous faites demi-tour. C’est pareil avec les médias aujourd’hui », estime David Cohn.

Non Profit Organization

Plutôt qu’une start-up, Spot.US se définit comme une « non-profit organization », un « projet à but non lucratif visant à être pionnier du journalisme payé par la communauté », précise David Cohn. Sur son site Internet, Spot.Us déclare d’ailleurs vouloir permettre au public « de lancer des enquêtes avec des donations déductibles fiscalement, sur des sujets importants et peut-être négligés » (sous-entendu par les rédactions classiques).

Pour autant, un modèle économique s’esquisse: outre les donations effectuées par les internautes (ils peuvent soutenir Spot.Us en plus de leurs financements d’articles), Spot.US vit du mécénat (donateurs privés), mais aussi de publicité. Et ce de manière originale : ici, pas de bannières, mais depuis le mois de juillet, les annonceurs peuvent proposer des sondages en ligne : l’utilisateur qui accepté de d’y répondre reçoit 5 dollars à dépenser pour financer un des articles sélectionnés par l’annonceur.

Le site compte ainsi une audience moyenne de 2 000 pages vues par jour, une communauté de 2 000 membres, et en moyenne « 5 articles publiés par semaine ».

No comment en revanche sur le chiffre d’affaires. Le record en termes de financements? « Trois de nos sujets ont reçu 13 000 dollars de financements », précise David Cohn. De quoi faire rêver tout grand reporter…

Un des reportages les plus impressionnants cofinancés par les internautes était ainsi consacré à l’histoire d’un amas de déchets flottant dans l’océan Pacifique. Consécration du concept de Spot.US, le quotidien le New York Times avait précommandé ce reportage, publié dans ses pages en novembre 2009.

Résultat, les frais engagés par la journaliste Lindsey Hoshaw pour réaliser son reportage lui ont été réglés d’avance non pas par le commanditaire de cet article, le NY Times, mais par des centaines de donateurs, via Spot.US. Elle a récolté 6 000 dollars de dons.

Ce qui permet donc de financer des reportages aux coûts (déplacements, etc) parfois élevés, surtout pour des journalistes indépendants, qui doivent habituellement avancer les frais avant de les voir couverts par la rédaction qui publiera leur papier. Qui plus est, cela donne au journaliste le temps d’enquêter en profondeur. Du temps et des moyens, une denrée qui se raréfie d’ailleurs pour les journalistes dans les rédactions.

Déclinaisons à l’étranger

En tous cas, le concept commence à faire florès un peu partout dans le monde : avec Gojournalism.ca au Canada, YouCommNews.com en Australie, Spotus.it en Italie… Même un portail dédié au cofinancement de projets de photojournalisme a vu le jour, Emphas.is.

Version bêta publique de Glipfix le 27 octobre

En France aussi, le premier site dédié au co-financement de reportages s’apprête à voir le jour. Glifpix, en sommeil depuis un an, sera lancé le 27 octobre, annonçait hier la newsletter spécialisée Satellinews.

« Nous allons lancer notre plateforme en version bêta publique », confirme à Owni.fr Hélène Huby, directrice de projet chez FaberNovel. La société dédiée à l’innovation va financer Glipfix pendant 6 mois, durant lesquels « nous allons tester le concept, et selon les retours des utilisateurs, esquisser notre modèle économique », précise Hélène Huby.

Pour développer la plateforme technique de Glipfix, les partenaires (JamesSpot, Exalead, BayardPresse, Bearstech et FaberNobvel) avait déjà reçu une dotation de 250 000 euros par le ministère de économie et des Finances.

Deux journalistes (Sylvie O’Dy et Hala Kodmani) qui étudieront les propositions de sujets. « Les sujets d’investigation, de reportage demandant du temps, seront privilégiés », précise Hélène Huby.

Un autre petit nouveau devrait émerger sur le même modèle en France : J’aime l’info déjà présenté ici, et que l’équipe de Rue89 [disclaimer : média auquel je collabore] devrait dévoiler le 22 octobre, lors de la Journée de la presse en ligne, organisée par le SPIIL.

À suivre…

Crédit photo CC FlickR par st bernard

À lire aussi notre dossier sur le crowdsourcing et celui sur le crowdfunding

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http://owni.fr/2010/10/12/spot-us-glifpix-jaime-info-les-debuts-du-crowdsourcing-applique-au-journalisme/feed/ 7
L’âge adulte de l’activisme sur Facebook http://owni.fr/2010/09/24/l%e2%80%99age-adulte-de-l%e2%80%99activisme-sur-facebook/ http://owni.fr/2010/09/24/l%e2%80%99age-adulte-de-l%e2%80%99activisme-sur-facebook/#comments Fri, 24 Sep 2010 15:20:46 +0000 Nicolas Kayser-Bril http://owni.fr/?p=29392 Le 4 février 2008, 12 millions de personnes ont défilé contre les FARC, un groupe paramilitaire colombien. 40 fois la manif du 23 septembre dernier ! Pourtant, aucun syndicat n’était là pour pousser les participants dans la rue. Un million de voix contre les FARC a été lancé par un programmeur colombien de 28 ans uniquement sur Facebook. Son groupe, ouvert fin janvier 2008, a rassemblé des dizaines de milliers de membres en quelques jours. La couverture médiatique a accompagné l’effet boule de neige.

Grâce à Facebook, un manif contre les FARC à Calgary

100 membres pour 1 manifestant

Forts de ce succès, les activistes en ligne se sont rués sur Facebook pour changer le monde. À la fin de l’été 2009, par exemple, à quelques milliers de kilomètres de Bogota, un autre groupe Facebook a été créé, cette fois contre Chavez. En quelques jours, l’enthousiasme se répand et le groupe approche les 400.000 membres. Pourtant, le 4 septembre, moins de 100.000 personnes ont défilé dans différentes villes d’Amérique du Sud. Pour comparer avec nos références, c’est, grosso modo, la taille du cortège parisien du 23 septembre. Pas de quoi pavoiser.

Quiconque a déjà organisé une mobilisation via le réseau social a pu vérifier ce théorème : pour chaque centaine de membres du groupe Facebook, compter 1 manifestant.

Les Américains ont même inventé un mot pour ces 99% d’activistes de salon, les slacktivists. Ils résolvent les problèmes du monde en signant des pétitions en ligne et en invitant leurs amis à participer à longueur de journée, mais passent rarement le pas vers des actions plus concrètes. Même si certaines pétitions ont atteint leur objectif, comme celle des 73.000 Allemands assemblés contre l’interdiction des jeux vidéo violents, la plupart restent lettre morte. On pourrait même suggérer qu’elles sont contre-productives, puisque l’internaute qui coche une case sur un site web a l’impression d’agir et sera moins enclin à prendre d’autres mesures (don, manif).

Les Iraniens peuvent témoigner de la faible efficacité de la mobilisation en ligne. Changer son image de profil ou rejoindre un groupe n’a absolument aucun impact sur le terrain. Cette limite de l’engagement en ligne tient aux faibles barrières à l’entrée. Puisqu’il est facile de s’engager de la sorte, les actions menées via Facebook attirent une forte proportion d’internautes qui n’ont de toute façon aucune envie de s’impliquer plus avant. Le problème, pour les organisateurs, reste qu’il leur est impossible de faire la différence entre leurs facebookeurs sérieux et les dilettantes.

D’ailleurs, un sondage réalisé l’année dernière auprès d’activistes en ligne a montré que pour un tiers d’entre eux, le meilleur canal de communication restait les médias broadcast, type télévision. Cela dit, ce résultat peut être biaisé si les activistes sondés proviennent de pays où Internet reste peu développé. Il serait intéressant de reposer la question en faisant l’hypothèse d’un taux de pénétration égal entre télé et web.

Ethan Zuckerman revenait lors de la conférence TED sur les limites et les derniers exemples de mobilisation sur les réseaux sociaux. Si les buts physiques ne sont pas toujours atteints, il montre comment des mouvements auto-organisés dans un pays peuvent avoir un impact sur le débat dans un autre.

Financement social

Cliquer pour afficher son soutien reste beaucoup plus confortable que de sortir dans la rue ou que de sortir sa carte bleue pour faire un don. L’application Causes était l’exemple typique de cette dissonance entre les déclarations d’intention et les résultats obtenus. D’après cet article du Washington Post de 2009, moins de 1% des utilisateurs donnaient via la plateforme. Par ailleurs, le don médian ne dépassait pas 25 dollars, contre plus de 50 dollars dans les circuits de dons traditionnels. Je m’étais moi-même moqué de Causes il y a 3 ans, en notant que les fonds levés ne dépassaient pas les 2 cents par prospect.

En d’autres termes, un taux de don ridicule et des montants dérisoires découragent les ONG de s’organiser sur le réseau social. Pourtant, les chiffres 2010 de l’application montrent que la mobilisation finit par payer. Les fonds transférés par l’app’ sont passé de 20.000 dollars par semaine en 2008 à 200.000 dollars aujourd’hui.

L’activisme sur un réseau social doit d’abord être… social. Pour une organisation, il n’est absolument pas rentable de tanner un internaute pendant des jours pour le voir cracher 20 dollars. Pour parler en termes extrêmement froids, il faut pouvoir transférer les coûts d’acquisition d’un donneur de l’ONG à ses supporteurs.

Concrètement, cela signifie que celui qui a déjà donné, ou qui soutient la cause, doit, à son tour, convaincre ses amis, qui convaincront leurs amis, et ainsi de suite. Grâce à cet effet boule de neige, quelques organisations ont réussi à lever plus de 100.000 dollars grâce à Causes.

De l’autre côté de l’Atlantique, une start-up a bien compris que le don sur Facebook est une expérience sociale, qui doit être vécue entre amis. Son chiffre d’affaire annuel est plus de dix fois supérieur à celui que Causes a cumulé en trois ans. Just Giving permet carrément à quiconque de collecter des fonds au profit d’une ONG. Tout bénéf’ pour cette dernière, qui peut ainsi récolter sans dépenser un centime.

Pour la prochaine manifestation française, imaginons ce que pourrait faire la CGT sur Facebook ! Le syndicat n’y dispose pour l’instant que d’une page générée automatiquement. La route est longue…

illustration FlickR CC : Flats!

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La symphonie de l’open source http://owni.fr/2010/08/26/la-symphonie-de-lopen-source/ http://owni.fr/2010/08/26/la-symphonie-de-lopen-source/#comments Thu, 26 Aug 2010 15:30:34 +0000 Richard Esguerra http://owni.fr/?p=26135 Que les amoureux de la musique prennent note : la bibliothèque de musique classique libre de droits Musopen a besoin de vous pour libérer bon nombre de symphonies emprisonnées par le copyright. Musopen cherche à résoudre un problème bien difficile : alors que les symphonies écrites par Beethoven, Brahms, Sibelius ou encore Tchaïkovsky sont tombées dans le domaine public, de nombreux enregistrements et arrangements des ces oeuvres restent sous le coup du copyright.

Cela veut dire concrètement que, même après avoir acheté un CD ou une collection de MP3 de ces musiques, vous ne pourrez pas les utiliser comme bon vous semble bien qu’elles soient dans le domaine public, comme par exemple les partager sur un réseau peer-to-peer ou les utiliser pour la bande son d’un film que vous avez en projet.

Crowdfunding symphonique

Pour en finir avec cette injustice, Musopen demande donc à sa communauté de se rassembler pour pouvoir embaucher un orchestre de niveau international afin d’enregistrer de superbes interprétations de ces symphonies. Musopen renoncera ensuite à tous ses droits sur les enregistrements, donnant ainsi au public la liberté d’utiliser totalement ces oeuvres : les télécharger, partager, détourner ou encore les remixer sans aucune limite.

La récolte de fond se fait par Kickstarter, un site où les utilisateurs peuvent financer de nombreux projets créatifs. Le principe de Kickstarter est simple : “tout ou rien”. Chacun peut mettre une certaine somme sur un projet, un peu comme une promesse de don ou un crédit. L’argent n’est versé au porteur du projet qu’à partir du moment où le besoin total de financement annoncé est atteint.

Que le partage se fasse !

Le blocage de toutes ces oeuvres, de cette richesse culturelle par des intérêts de droits d’auteur – en dépit de leur ancienneté, de leur universalité et de leur importance – est réellement un frein à leur partage pour le plus grand nombre. D’ailleurs des problèmes comme celui-ci sont exacerbés par les disparités existantes entre les différentes législations nationales. Cela créé différentes notions de “domaine public” qui permettent aux propriétaires des copyrights d’empêcher la mise en place d’archives ouvertes en ligne pour ces oeuvres.

La campagne lancée par Museopen représente une solution créative et innovante qui pourrait nous assurer que de telles oeuvres musicales, essentielles, soient préservées et partagées avec les générations futures.

Amoureux de la musique et combattants du copyright : votez avec votre portefeuille et supportez le travail de Musopen !

Crédits photos cc FlickR fdecomite, yuan2003, carolt.


Article initialement publié sur EFF

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Le crowdfunding produit un “effet Obama” dans le journalisme http://owni.fr/2010/08/11/le-crowdfunding-produit-un-effet-obama-dans-le-journalisme/ http://owni.fr/2010/08/11/le-crowdfunding-produit-un-effet-obama-dans-le-journalisme/#comments Wed, 11 Aug 2010 16:35:42 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=23843

Tanja Aitamurto est une journaliste spécialisée dans l’intelligence collective -sa thèse porte sur ce sujet- le crowdfunding et le crowdsourcing dans le journalisme. D’origine finlandaise, elle est maintenant basée dans la Silicon Valley et contribue principalement au Huffington Post et au Helsingin Sanomat, le principal quotidien en Finlande. Pour OWNI, elle revient sur le développement du crowdfunding, qui concerne le journalisme mais aussi les industries créatives en général.

Le monde du journalisme semble découvrir le crowdfunding, mais est-ce vraiment si neuf ?

Le crowdfunding est un mécanisme de financement qui existe depuis un certain temps. Le premier effort bien connu dans ce sens a eu lieu en 2003, quand le reporter américain Chris Albritton a réuni assez de dons de lecteurs pour faire un reportage en Irak dans le cadre de son initiative “Retour en Irak“.

Cependant, le crowdfunding est devenu de plus en plus populaire dans le journalisme, pour beaucoup grâce à des plates-formes de crowdfunding à succès comme KickStarter et Spot.Us. Par exemple, rien que sur Spot.Us, plus de soixante sujets ont été financés et plus de 100.000 dollars ont été donnés à des pitches.

Ces derniers temps, il y a aussi eu des expériences de crowdfunding rétrospectif. Par exemple, Paige Williams, une journaliste américaine récompensée pour son travail, a financé son article sur Dolly Freed en réunissant des dons après la publication sur son site.

D’autres formes de mécanisme de crowdfunding comme Flattr et Kachingle gagnent du terrain. On appelle maintenant ces modèles des “paiements sociaux” (social payment, ndlr).

Une des raisons de l’évolution du crowdfunding, c’est le développement rapide des outils du web 2.0, et la pénétration de l’Internet. Ces outils facilitent l’utilisation du crowdfunding dans le cadre du journalisme. En outre, ces modèles traditionnels de revenus deviennent de plus en plus inefficaces, et il faut trouver des alternatives. C’est là où le crowdfunding devient utile.

Diriez-vous que l’émergence actuelle du crowdfunding est un effet positif de la crise des médias ?

Oui, c’est un mouvement positif par deux aspects : d’abord, le crowdfunding a prouvé qu’il fonctionnait comme modèle de financement pour une certaine forme de journalisme, comme le reportage d’investigation et les sujets civiques.

Les nouvelles sources de revenu comme le crowdfunding pour les journalistes sont nécessaires alors que le journalisme entre dans l’ère post-conglomérat. Cela signifie que les grandes entreprises de médias emploient moins de journalistes, mais les journalistes travaillent plus souvent comme freelance ou journaliste-entrepreneur. Par conséquent, ces derniers ont besoin de nouvelles façons d’obtenir des fonds pour leur travail.

Second point, il est très important d’expérimenter de nouveaux business models. C’est la seule façon de trouver ce qui marche vraiment, étant donné que les anciens modèles ne marchent plus si bien.

Est-ce que cette réflexion est spécifique aux pays occidentaux ? Pour quelles raisons ? La crise des médias ?

Les plates-formes et les mécanismes de crowfunding semblent se développer dans les pays occidentaux, probablement en raison du développement parallèle d’autres phénomènes d’interaction à doubles sens, comme le crowdsourcing, le mouvement de l’open data, etc., qui donnent plus de pouvoir aux gens.
Un autre facteur, c’est que les entreprises de média cherchent de nouvelles sources de revenus comme elles ne vont pas si bien financièrement et nous voyons beaucoup d’expériences dans ce sens pour en trouver.
Le troisième élément, c’est que le capital-risque est plus développé dans les pays occidentaux et peut financer des start-ups dans ce domaine, ainsi que d’autres mécanismes de financement comme le Knight News Challenge concours et autres prix.
Cependant, il y a aussi eu d’autres actions dans ce domaine en dehors des pays occidentaux. Par exemple le site de journalisme citoyen OhMyNews, qui vient de fermer sa version internationale, a essayé de collecter des dons de lecteurs sous la forme de licences de membre.

Pensez-vous que le crowdfunding va devenir de plus en plus important dans le financement des reportages ? Du travail créatif en général ?

Oui, absolument, le crowfunding a démontré son efficacité comme mécanisme de financement pour certains types de journalisme. Avec l’aide de plates-formes de crowdfunding comme Spot.Us, Kickstarter et SellaBand, cette méthode devient de plus en plus commune comme source de financement de projets journalistiques et artistiques. Ces plates-formes fournissent une grande opportunité de soutenir des projets particuliers que les gens apprécient au lieu de payer pour l’abonnement complet à un journal qu’ils ne lisent la plupart du temps que partiellement.

De plus, ces plates-formes offrent habituellement la transparence qui manque dans les organisations traditionnelles, comme les entreprises de médias et les rédactions. La transparence accrue offerte par les plates-formes de crowdfunding est importante pour les donateurs, ils peuvent suivre l’utilisation de leur argent.

Maintenant la question, c’est l’ajustement de ces mécanismes. Le grand changement dans les business models du journalisme, c’est qu’il n’y aura plus une ou deux sources de revenus comme c’était le cas jusqu’à présent (publicité et abonnements). Les revenus vont venir de sources multiples et différentes en fonction de la publication et de sa niche. Les dons peuvent en faire partie, selon le cas.

Qu’est-ce qui fait qu’un système de crowdfunding aura du succès ?

Actuellement, il existe deux façons d’approcher le paiement volontaire : soit la somme est fixée, ou le lecteur peut donner autant qu’il le désire. Par exemple dans le domaine du paiement social, Kachingle laisse les gens payer seulement 5 dollars par mois pour tous les sites qu’ils visitent, alors que sur Flattr vous pouvez déterminer la somme vous-mêmes.
L’argument de Kachingle c’est que quand la somme est fixée, le coût de la transaction mentale sera plus petite pour le donateur – ce qui signifie que c’est facile de donner quand vous n’avez pas besoin de réfléchir au montant du don.
Flattr donne aux utilisateurs plus de liberté, de même Spot.Us, le système indique au donateur une suggestion de don, mais ce dernier peut changer la somme. Ces deux approches ont leurs avantages et leurs inconvénients mais les différences sont minimes. Du point de vue des donateurs, c’est important d’avoir une expérience utilisateur intégrée avec le système de micropaiement. De plus, c’est important de donner aux donateurs des outils pour construire leur identité par leur don. Personnellement, je pense que le mieux c’est de fournir au donateur une suggestion du montant, mais aussi la liberté de le changer.
Je ne vois pas forcément une plate-forme l’emporter sur les autres, elles peuvent co-exister, s’il y a assez d’utilisateurs. Des systèmes de paiements sociaux, celui qui aura le plus de succès sera celui qui sera utilisé par le plus grand nombre de blogueurs importants, et des publications établies.

Vous soulignez que les systèmes de crowdfunding reposent sur l’intelligence collective, êtes-vous optimiste ?

Le cœur de l’intelligence collective peut être défini ainsi : la connaissance est plus juste quand elle est issue de contributions provenant d’une population répartie. Au lieu de compter sur un seul agent, la connaissance est à son meilleur quand une foule variée est conviée au processus de co-création. Le crowdsourcing et le crowdfunding sont des manifestations de l’intelligence collective.

Dans un modèle journalistique crowdfundé où on peut choisir un pitch auquel donner – comme sur Spot.Us-, le donateur a en fait le pouvoir de choisir quels types de sujets seront écrits. Il y a un parallèle entre le don et le vote : en donnant pour le pitch d’un sujet, le donateur vote pour un sujet qu’il souhaite voir publié. Dans un modèle journalistique crowdfundé, le pouvoir éditorial devient donc décentralisé. Les gens ont leur mot à dire sur les sujets qu’ils veulent lire, à la place des rédactions.

Ce changement radical mène effectivement à une autre question inévitable : est-ce que certains sujets resteront privés de couverture, sans publicité, si les lecteurs peuvent choisir ce qu’ils souhaitent lire ? Par exemple, un article sur telle minorité n’obtiendra peut-être pas assez de dons.

Je ne considère pas cela comme un problème, car les modèles crowdfundés sont encore marginaux. Je ne pense pas non plus que cela deviendra un problème car le crowdfunding restera une source de revenus parmi d’autres.

Est-ce que les écoles de journalisme préparent assez leurs étudiants à se voir eux-mêmes en termes commerciaux ? Est-ce que ce sera plus facile pour la nouvelle génération de journalistes d’embrasser ce modèle, en raison des difficultés qu’elle a déjà connues ?

Les écoles de journalisme traditionnelles n’ont pas préparé les étudiants au changement que nous sommes en train de vivre dans l’industrie du journalisme. Les business models et la réflexion entrepreneuriale n’ont pas été assez mis en avant dans le curriculum, quand ces sujets n’ont pas carrément été oubliés.

Nous entrons dans l’ère post-conglomérat du journalisme, comme je l’ai dit plus haut. Le journalisme entrepreneurial nécessite des compétences complètement nouvelles pour les journalistes quand ils sont diplômés de leur école.

Maintenant, l’état d’esprit dans les écoles de journalisme change, et les écoles enseignent de plus en plus ces connaissances, du moins aux États-Unis et en Grande-Bretagne.

Vous dites que “des changements similaires se passant dans les industries créatives, alors que les marques et les institutions comme les labels et les institutions médiatiques perdent du pouvoir.” Serait-il opportun qu’ils partagent ensemble sur ce sujet ?

Oui, tout à fait. Ces changements que nous observons dans le journalisme ont aussi lieu dans d’autres champs de la société : dans les domaines de l’éducation, de la connaissance, de la santé, du leadership, des entreprises, et les vieilles institutions du business se défont. Ces vieilles structures ne sont pas adaptées à ce nouvel âge qui requiert de la transparence et des interactions dans les deux sens.

Vous avez expliqué qu’il se passe dans le journalisme un “effet Obama”. Pourriez-vous résumer votre analyse ?

J’ai écrit sur le Huffington Post que “l’effet Obama” a lieu dans le journalisme, comme le pouvoir éditorial est en train de se décentraliser et que les gens peuvent de plus en plus avoir un impact sur les articles qui sont écrits, par exemple à travers les plates-formes de crowdfunding. Elles permettent aux gens de donner de petites sommes pour soutenir le journalisme qu’ils préfèrent et donc, une foule de donateurs peut avoir un impact. Exactement de la même façon que la foule a aidé Obama à réussir dans sa campagne par de petits dons. Le succès du crowdfunding est une autre preuve que les petites actions comptent.

Petites sommes deviendront grandes.

Vous avez noté que les donateurs ne participent pas beaucoup. À quoi cela tient-il ? Est-ce une lacune que les systèmes de crowdfunding devraient combler ?

Il est très intéressant que les donateurs dans les modèles de journalisme crowdfundé ne soient pas plus intéressés par la co-création. En principe, ils devraient participer plus, mais dans les faits, ils ne le font pas. Ils semblent estimer que c’est assez participer que de donner de l’argent pour un pitch. Ils ne contribuent pas beaucoup via les autres façons offertes, comme donner des tuyaux ou commenter.

Il y a plusieurs raisons à ce type de comportement. Le premier, c’est que les donateurs considèrent que le journaliste est l’expert sur le sujet et que les donateurs n’ont pas tant de connaissances que cela, pas assez pour les partager. Second aspect, les moyens de participer ne sont peut-être pas assez sophistiqués. En se basant sur les expériences de projets crowdsourcés dans le journalisme, plus la tâche est étroite et sophistiquée, plus il est probable que la foule participe.

Pensez-vous que les systèmes de micro-financement embeddable comme Flattr devrait et pourrait être utilisés par les médias traditionnels ?

Complètement, en fait, Flattr et son rival américain Kachingle sont appelés maintenant des “paiements sociaux”. Les lecteurs ont besoin d’avoir le choix sur le moyen dont ils payent pour le journalisme qu’ils aiment. Ils ont en particulier besoin du choix de soutenir certains auteurs et un certaines formes de journalisme, au lieu de payer pour toute la publication ou article, comme c’est le cas dans le modèle de revenu traditionnel.

Une question large pour conclure : pensez-vous, comme Andreas Kluth, qu’il n’y a pas de crise des médias ?

Non, le journalisme n’est pas en crise. Certaines entreprises de médias sont en crise car elle manque d’innovation et ont fait des investissements inconsidérés et autres décisions financières. Cependant, la débâcle financière de certaines entreprises de médias mène à la crise beaucoup de journalistes qui sont licenciés, une solution d’urgence pour sortir la tête de l’eau.

Le journalisme fait mieux que jamais, à plusieurs égards. L’audience est plus importante que jamais, par exemple le New York Times n’a jamais autant de lecteurs grâce à Internet. La liberté d’expression est plus forte que jamais car presque n’importe qui peut publier, en ligne, sans de lourds investissements dans des imprimeries et des bureaux. Le journalisme devient universel, dépassant les frontières, comme nous le voyons avec des plates-formes comme WikiLeaks.

Le journalisme fait mieux que jamais grâce à toutes les innovations qui émergent : nouveaux modèles de production de contenus, les lecteurs ne sont plus seulement des lecteurs mais participent au journalisme de co-création, expériences dans les modèles de revenus, c’est un nouvel âge d’or pour le journalisme.

La société a besoin du journalisme, c’est pourquoi il y aura toujours des façons de la financer aussi. Elles diffèrent peut-être de celles qui ont été utilisées depuis Gutenberg et sa presse imprimée mais cela ne signifie pas qu’elles soint pires. Ni que le journalisme soit en crise.

À lire aussi

De Tanja Aitamurto :

Spot.us ou l’impact du crowdfunding sur le journalisme et Les journalistes travaillent en public pour le public, deux articles publiés sur PBS MediaShift traduits par la soucoupe ; The Obama-Effect in Journalism: Decentralized Editorial Power

Ses présentation sur SlideShares

De Davduf et Fil : Flattr, vers un nouveau modèle économique ?

Images CC Flickr  kbaird et  By nickwheeleroz

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Ouvrez vos données, devenez une organisation-plateforme http://owni.fr/2010/08/11/ouvrez-vos-donnees-devenez-une-organisation-plateforme/ http://owni.fr/2010/08/11/ouvrez-vos-donnees-devenez-une-organisation-plateforme/#comments Wed, 11 Aug 2010 16:28:42 +0000 Tanja Aitamurto http://owni.fr/?p=23994 Les organisations à but non-lucratif [NdT: "non-profit" en anglais] font face à des défis similaires aux autres organisations : les vieilles structures ne fonctionnent pas à notre époque,  et les nouvelles restent encore à trouver.

Traditionnellement, les organisations à but non-lucratif sont des structures fermées qui fonctionnent comme intermédiaire entre les donateurs et les bénéficiaires. Les organisations allouent les fonds aux projets qu’ils ont décidées de doter, et les donateurs soutiennent les organisations, plutôt qu’un projet spécifique. Les bénéficiaires et les donateurs sont aux extrémités opposées de la chaîne – il existe à peine un contact entre eux.

Contact direct et soutien à des projets particuliers

Le rôle des organisations à but non-lucratif comme intermédiaire est en train de changer. Les donateurs peuvent à présent  soutenir un projet en particulier plutôt qu’une organisation dans son ensemble. Aujourd’hui, les donateurs peuvent aussi avoir un contact direct avec les bénéficiaires. Par exemple, sur la plateforme de micro-prêts Kiva.org, un donateur peut directement prêter de l’argent à tel entrepreneur, et sur des services de crowdfunding comme Spot.Us et KickStarter, un donateur peut soutenir exactement le type de journalisme ou le projet qu’il apprécie.

La foule peut s’organiser elle-même autour d’objectifs, de campagnes et de projets sans les structures que les organisations  fournissent traditionnellement. Les gens n’ont pas besoin d’un intermédiaire, tout non-lucratif qu’il soit,  pour provoquer l’impact qu’ils souhaitent voir advenir.

Ce changement pose un défi pour les organisations non-profit traditionnelles: comment peuvent-elles le tourner à leur avantage ?

La réponse consiste à devenir des plates-formes ouvertes qui facilitent la collaboration dans des espaces ouverts et réduisent radicalement la distance entre le donateur et le bénéficiaire.

Cela commence par l’ouverture des procédés d’attribution des dons – laisser par exemple les donateurs avoir leur mot à dire sur la destination des dons et les projets qu’ils soutiennent.

Richesse des données à partager

Autre piste: libérer leurs données pour que tout le monde s’en serve. Les organisations à but non-lucratif ont beaucoup de données intéressantes et rares issues de recherche. Les données pourraient être utilisées de différentes façons dans des buts différents, que ce soit dans la recherche académique ou le développement d’applications pour iPhone.

Connaissez-vous le cas réussi d’une organisation non profit traditionnelle qui a redéfini son rôle et sa structure ? Et sur l’ouverture des données ? Est-ce que quelque part dans le monde une structure à but non-lucratif a ouvert des données ?

Si vous avez des réponses, n’hésitez pas à me contacter:  tanja.aitamurto at gmail.com

Billet initialement publié sur le blog de Tanja, hébergé par le Huffington Post

Illustrations CC FlickR Mr. Kris,

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