OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Écrans noir http://owni.fr/2011/07/01/ecrans-noir/ http://owni.fr/2011/07/01/ecrans-noir/#comments Fri, 01 Jul 2011 09:23:03 +0000 Alexandre Léchenet http://owni.fr/?p=72463

Je me souviens. Je n’achetais pas souvent de journaux, j’étais encore jeune, je sortais du lycée. Je préférais mon ordinateur. Mais bon, on me promettait dans un grand journal en papier de me parler de tous les écrans. Beau défi. J’ai tout de suite acheté. J’ai lu, j’ai même racheté.

Et puis parler d’Internet sur le papier, c’est chouette. Mais finalement, les écrans sont relatés sur des écrans. Je lis, je lis. En 2007, j’envoie un email à Astrid Girardeau, je suis étonné par ses découvertes régulières et elle me convainc de me créer un Netvibes. Je dois à Écrans.fr ma découverte des RSS, c’est déjà pas mal.

En 2008, je dois trouver un stage pour mon master. J’envoie un mail à Erwan Cario pour lui demander si je peux moi aussi partager ma veille. Surtout que je suis depuis quelques jours à peine inscrit sur Twitter où une de mes idoles, sur Twitter, est Alexandre Hervaud, stagiaire à Écrans, lui aussi. Mais j’ai rien écrit, alors je vais ailleurs.

Le site m’assure de longues pauses pas toujours discrète avec ses jeux chronophages, et sans lui, je ne sais pas comment j’aurais survécu au jour le plus chiant du monde.

Et entre temps, d’autres stagiaires défilent, Thibaut Charron qui fait un super rapport de stage où vous pourrez tout savoir sur l’histoire d’Écrans.fr. Et puis Andréa Fradin, qui est trop chouette. Et puis d’autres, mais je les connais pas trop.

En 2009, Écrans était une des têtes de pont de la fronde anti-Hadopi. Je comprenais bien grâce à eux et les autres. Ça m’avait même poussé à montrer ma tête sur l’Internet.

Enquiller les CDD

En 2011, Écrans n’est pas assuré d’avoir un avenir tel qu’il existe actuellement. Ils ne veulent pas renouveler Alexandre Hervaud et Camille Gévaudan et poursuivraient donc avec des précaires, ainsi le dit la pétition. Donc ne pas assurer une stabilité au site.

Selon moi, c’est un peu la preuve que Internet, c’est SERIOUS BUSINESS, et le SB c’est comme un cancer qui détruit ce qu’on aime bien. On ne peut pas rester sur un site à parler d’un truc qui assure 25% des emplois depuis 1995 en étant un peu drôle, il faut prendre un visage et un virage sérieux.

Par exemple, on peut demander à un vieux journaliste qui n’y connaît pas grand chose de parler de l’Internet, avec les conséquences que l’on sait. On peut continuer à lire des titres un peu méprisant, où Rue89 n’est qu’un “site Internet” quand il pourrait être surtout un “média“, un “site d’information” ou Rue89, tout simplement.

Arrêtez le LOL les amis, INTERNET c’est devenu SERIOUS BUSINESS. Grâce à DSK, les journalistes tweetent à la télé et plus “entre petits sapajous” sur l’Internet.

Alors oui, je trouve ça dommage qu’on n’assure pas un peu d’avenir à Écrans.fr, alors que je pense que le site a plutôt trouvé un public. Et qu’il traitait de tout le digital, sans forcément se prendre au sérieux, ce qui est peut-être la seule âme de l’Internet.

Et j’aime pas l’INTERNET-SERIOUS-BUSINESS.

J’en suis là.

Billet initialement publié sur misc.alphoenix.net

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Regards sur une décennie de mal-logement http://owni.fr/2011/04/30/argos-regards-sur-une-decennie-de-mal-logement/ http://owni.fr/2011/04/30/argos-regards-sur-une-decennie-de-mal-logement/#comments Sat, 30 Apr 2011 16:00:56 +0000 Ophelia Noor http://owni.fr/?p=58756 Au début des années 2000, plusieurs photographes du collectif Argos ont réalisé des reportages sur la question du mal-logement et des personnes sans-abri. Ils ont suivi, pendant plusieurs mois, le quotidien de familles vivant dans un bois à côté d’une cité HLM en Seine-et-Marne, fait le tour des hôtels meublés du 20ème arrondissement de Paris, rencontré des hommes vivant sur une bretelle d’accès du périphérique à Porte Maillot ou suivi le parcours d’un homme, de la rue à la réinsertion.

Dix ans après, les sans-abris étaient dans l’agenda de l’Union européenne qui faisait de l’année 2010, celle de la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. L’objectif : trouver des positions communes et développer des politiques globales et efficaces dans les pays de l’Union.
La fin du sans-abrisme, une utopie ? Le jury de la conférence de consensus sur le sans-abrisme organisée à Bruxelles en décembre dernier répondait, avec optimisme et détermination :

L’absence de chez-soi constitue une injustice grave et une violation des droits fondamentaux de l’homme à laquelle on peut et on doit mettre fin. Le jury considère ainsi que l’absence de chez-soi peut être progressivement réduite et que l’on peut, en fin de compte, y mettre un terme.

Le Parlement lui emboîtait le pas avec cette déclaration du 16 décembre 2010 sur la stratégie de l’UE pour les personnes sans-abri, qui demande :

  • au Conseil de s’engager avant la fin de l’année 2010 à régler la question des personnes sans-abri d’ici 2015,
  • invite la Commission (…) à aider les États membres à élaborer des stratégies nationales efficaces
  • demande à EUROSTAT de recueillir des données sur les personnes sans-abri.

Pour le moment, c’est la France qui serait championne européenne du mal logement, avec 52 personnes sans domicile fixe pour 100.000 habitants.

Nous avons laissé la parole aux photographes du collectif Argos qui nous racontent, chacun, l’histoire de leur reportage et de leurs rencontres.

Ces familles qui n’ont plus droit de cité

Par Eléonore Henry de Frahan

Apres l'école Morgane, 8 ans, rentre chez elle. Chez elle, ce sont les quatre caravanes du haut, dans ce petit bois coincé entre la nationale 105 et le château d'eau où vivent deux familles et un homme seul. ©Eleonore Henry de Frahan Collectif Argos/PictureTank

C’est en 2000 que je découvre à la lisière des villes, des familles françaises qui survivent dans des habitats de fortune sans électricité ni eau courante. Pour assurer une vie décente à leurs enfants, les parents cumulent les petits boulots. Je m’y rendais en RER et à vélo et je développais mes films moi-même.

J’ai rencontré les familles petit à petit avec l’aide du Dr Moriau de Médecins du monde qui m’a introduit. Madeleine est salariée comme femme de ménage. Pourtant, elle vit en caravane, avec son mari Gérard et ses deux filles, de 8 et 10 ans, juste en face de la barre HLM de Seine-et-Marne d’où ils ont été expulsés.

Ils n’ont ni eau ni électricité. Ils se servent d’un poêle à bois pour se chauffer et d’un groupe électrogène pour la télé. Tentant comme les autres parents du campement d’assurer une vie décente à leurs enfants. Notre société moderne lancée dans une course effrénée au profit laisse derrière elle une part de plus en plus importante de la population.

Il y a huit ans, Gérard a perdu son emploi. Après plusieurs mois sans revenus, la petite famille est venue camper dans ce bois. Au fil des ans, ils ont acquis plusieurs caravanes et les ont retapées. Chacune d'elle est une pièce de la maison. ©Eleonore Henry de Frahan Collectif Argos/PictureTank

J’ai réalisé ce reportage sans commande. Je voulais tout simplement sensibiliser les gens à ce problème de société. Des familles n’ont plus accès aux biens de consommation qu’on leur propose au quotidien, à un minimum de confort, ou tout simplement à un logement et à une vie décente. Cette précarité gagne du terrain et déferle aujourd’hui sur le monde du travail (missions d’intérims, travail à temps partiel). Avoir un emploi ne garantit plus l’intégration ni la protection sociale.

Patrick monte un vélo pour son fils avec les matériaux qu'il a récupéré. ©Eleonore Henry de Frahan Collectif Argos/PictureTank

Je suis retournée les voir régulièrement et le travail s’est échelonné sur un an et demi. J’ai continué a leur rendre visite ponctuellement pendant un temps, quand je le pouvais. Dernièrement je voulais justement avoir de leurs nouvelles mais ils ne sont plus sur le terrain et je ne sais plus comment les joindre.

Le reportage a été publié sur 8 pages dans VSD, il a été expose à différents endroits comme le centre culturel de Rezé, de Woluwe St. Lambert a Bruxelles, le festival de Biarritz sur la violence moderne, et il a accompagné les journées du livre avec l’association ATD quart monde.

Matériel : un Nikon f3 et des films Tri X n/b

Hôtels meublés

Par Guillaume Collanges

J'ai trouvé un appartement à 3800 francs mais je ne peux pas. Je touche 4000 francs par mois. ©Guillaume Collanges Collectif Argos/PictureTank

Le reportage sur les hôtels meublés s’est étalé sur six mois, en 2000. J’habitais le 20ème et c’est un arrondissement ou il y en a pas mal. Plusieurs fois je suis passé devant sans y prêter attention. Un jour j’ai lu une plaque “Hotel meublé – chambre au mois” et je me suis demandé qui vivait ici. J’ai fait du porte à porte, essayant de rentrer dans les établissements mais beaucoup d’entre eux n’aiment pas les curieux. Les marchands de sommeil préfèrent la discrétion.

A l’époque la moyenne était de 3500 francs (env 500€) pour une chambre avec lavabo. C’était le prix d’un studio sur le marché privé. Quand je trouvais un endroit accessible je faisais tous les étages en expliquant bien aux gens que je faisais un reportage. Peu voulaient répondre, surtout les femmes qui sont donc sous représentées dans le reportage. Elles se méfiaient d’un homme inconnu, même s’il se présentait comme un journaliste, d’autant qu’à l’époque je n’avais pas la carte de presse.

Je suis ici depuis trois mois. J'ai 37 ans, j'ai loué un appartement jusqu'à 33 ans, depuis, je vis en meublé. Je suis analyste programmeur, je travaille a Paris, parfois, en province. ©Guillaume Collanges Collectif Argos/PictureTank

L’ambiance dans ces hôtels est souvent triste, voir violente quand il y a trop d’alcool. Des situations de misère et de précarité qui s’installent dans la durée. Un seul avait une ambiance quasi “familiale”, je n’avais d’ailleurs pas eu le droit d’aller voir les deux premiers étages réservés aux habitués de longue date. Du 3ème au 5ème c’était autorisé, et pourtant une dame était là depuis dix ans !

Cela fait 10 ans que je suis ici, et mon fils onze. J

Toutes ces rencontres m’ont beaucoup marqué , certaines n’ont jamais été diffusées car les personnes n’ont pas voulu signer l’autorisation de diffusion. Mais je retiendrai toujours cette conclusion qu’avait eu une des rares femmes rencontrées, ancienne institutrice : “les problèmes, ça rend médiocre.”

Matériel : appareil Nikon fm, 35mm f2 et film Kodak Supra 400

Vie périphérique

Par Cédric Faimali

Thierry dans sa cabane au bord du périphérique parisien. @Cédric Faimali Collectif Argos/PictureTank

C’était en 2003, j’avais repéré les tentes de Thierry et Diego sur mon chemin en passant par la Porte Maillot. Quand je suis arrivé sur leur campement la première fois, Diego est sorti avec une barre de fer et m’a dit :

“Qu’est-ce que tu viens chercher ici ? Il n’y a rien à voler !”
J’ai répondu : “Je viens en ami”
Et il m’a dit : “Il n’y a pas d’amis ici !”

J’ai quand même réussi à amorcer la discussion et à lui expliquer ce que je faisais là. Je me rappellerai toujours de cette phrase : “Il n’y a pas d’amis ici”. La peur de se faire attaquer et dépouiller est constante. Diego, ancien légionnaire de 48 ans était installé là depuis 1999 avec son chat Gavroche, et venait de se faire agresser par des jeunes quand je l’ai rencontré. Il était tailladé au couteau.

Diego s'approvisionne en eau potable grâce aux bouches d'incendies des pompiers. @Cédric Faimali Collectif Argos/PictureTank

Diego et Thierry étaient un peu comme des Robinson Crusoë, ils disaient : “la société veut pas de nous, et nous, on veut pas d’elle. On n’étale pas notre misère en pleine rue, la mendicité fait chier tout le monde.” Ils se débrouillaient pour trouver de la nourriture, subvenir à leurs besoins. Ils en étaient fiers. Ils avaient la télé avec une batterie, ils coupaient du bois pour se chauffer. Ça ne les intéressait pas de toucher le RMI ou la CMU quand je les ai rencontré.

Le linge de Diego et Thierry sèche le long du boulevard périphérique. @Cédric Faimali Collectif Argos/PictureTank

Le reportage a duré tout un hiver et j’ai continué au printemps et à l’été suivant. Parfois je ne faisais pas de photos, j’allais discuter, j’amenais des batteries chargées, des cigarettes, des vêtements ou des couvertures. C’est très long comme reportage, c’est lourd psychologiquement, les gens sont parfois sur la défensive, ils ne comprennent pas toujours notre démarche, refusent de se faire prendre en photos et c’est normal. C’est leur vie. Il faut s’apprivoiser et aussi que la confiance s’installe.

Thierry, je l’ai croisé par hasard, en 2006, au bureau de Poste près de chez moi. Il avait eu des problèmes de dents, il s’était fait soigner et m’avait dit qu’il était hébergé. Puis leur campement a brûlé en 2007, j’étais allé voir les pompiers qui en étaient au début de l’enquête. Il privilégiaient l’accident.

Thierry dort malgré le bruit incessant des voitures. @Cédric Faimali Collectif Argos/PictureTank

Je vais reprendre ce sujet avec des personnes qui vivent dans les tunnels de La Défense, un autre endroit où on est pas censé vivre, dans les sous-sols du pôle financier. Aujourd’hui, leur campement a disparu.

Matériel : appareil panoramique hasselblad Xpan, film Porta 400 NC

Gilles, de la rue à la réinsertion

Par Jéromine Derigny

Gilles, SDF de 37 ans, fait sa vie entre Montreuil et Vincennes. Une grande partie de la journée, Gilles fait la manche, toujours au même endroit. ©Jérômine Derigny Collectif Argos/PictureTank

J’ai réalisé ce sujet en commande pour le Pèlerin, en janvier 2007 où j’ai suivi pendant plusieurs jours le quotidien de Gilles, rencontré au Samu social.

Après la publication, Gilles, ayant déjà passé plusieurs années à la rue, a semblé retrouver un regain d’énergie pour continuer à se battre, et trouver un centre d’hébergement. Puis du travail en réinsertion. J’ai décidé de garder le contact avec lui puisqu’il avait un portable, ça n’était pas trop compliqué. C’est ainsi que pendant un an, j’ai continué à le retrouver de temps à autres, dans son parcours de réinsertion à l’association Neptune, basée à Montreuil.

Gilles, sdf depuis plusieurs années et jusqu'en 2007, est maintenant en réinsertion, tant sur le plan du travail que du logement. ©Jérômine Derigny Collectif Argos/PictureTank

Une deuxième publication dans le Pèlerin a eu lieu un an après la première. On ne se refait pas si vite d’années de rue, et tout n’a pas été simple pour Gilles, une année ne suffit bien sûr pas pour se réinsérer. J’ai continué à garder contact avec lui, mais il est parti en province, chez Emmaüs. Puis petit à petit j’ai perdu sa trace, les coups de fil s’espaçant… de mon fait plutôt.

Gilles a organisé un tournoi de pétanque, ou se mélangent habitants du foyers, et personnes du quartier. ©Jérômine Derigny Collectif Argos/PictureTank

Je serais curieuse de savoir où il en est actuellement, je lui souhaite bien entendu d’avoir encore progressé dans son parcours…

Peut-être que lui ou une de ses connaissances sera lecteur d’OWNI !?

Matériel : Nikon D200 24mm (35mm) f2.8

48 rue du faubourg Poissonnière

Par Guillaume Collanges

Au 48 rue du Faubourg Poissonnière, les familles ont campé plus de deux mois dehors en attendant le relogement. ©Guillaume Collanges Collectif Argos/PictureTank

Au cours du reportage sur les meublés en 2000, je suis rentré en contact avec le DAL. Je voulais suivre également les mal logés qui squattent ces immeubles innocupés de Paris. Celui ci appartenait à une compagnie d’assurance italienne et était vide depuis plusieurs années quand les familles sont rentrées dedans.

C’était insalubre, les rats envahissaient la cour la nuit mais certains logements étaient assez grands. Les gens étaient plutôt “bien ici” pour la plupart. Mais un immeuble pas entretenu se délabre et deux plafonds s’étaient affaissés provoquant l’expulsion manu militari de deux familles….. vers des hôtels meublés comme solution provisoire. Bien sûr.

Dialika retrouvera un logement dans Paris. ©Guillaume Collanges Collectif Argos/PictureTank

La plupart des adultes travaillaient et avaient leurs papiers, et étaient en attente de logement social depuis des années…. comme beaucoup trop.
J’ai passé quinze jours avec eux sous la tente, les gens y dormaient à tour de rôle. C’est fatiguant, la rue est bruyante et le réveil est à 5h avec le premier camion poubelle de la ville. Les gens ont tous été relogés grâce à l’action du DAL.

Un été à Paris, au 48 rue du faubourg poissonnière. ©Guillaume Collanges Collectif Argos/PictureTank

Matériel : Nikon F90, 35mm f2, et film Supra 400


Crédits photos : © Collectif Argos/Picture Tank Tous droits réservés
Retrouvez les cinq reportages dans notre visionneuse /-)

Le collectif Argos fête ses 10 ans. Les rédacteurs et photographes vous invitent au vernissage de leur exposition le 11 mai à 18h00 à l’Espace Confluences à Paris.

Téléchargez le pdf.


L’intégralité des reportages est sur le site du collectif Argos :
Jérômine Derigny : Gilles de la rue à la réinsertion (2007 et 2009)
Guillaume Collanges : 48 bd poissonnière (2000) et Hôtels meublés (2000)
Cédric Faimali : Vie périphérique (2003)
Éléonore de Frahan : Ces familles qui n’ont plus droit de cité (2000)

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Rédactions: la révolte viendra-t-elle du web? http://owni.fr/2011/03/09/redactions-la-revolte-viendra-t-elle-du-web/ http://owni.fr/2011/03/09/redactions-la-revolte-viendra-t-elle-du-web/#comments Wed, 09 Mar 2011 15:43:53 +0000 Erwann Gaucher http://owni.fr/?p=50522 Sans le savoir, les journalistes du Post auraient-ils insufflé la révolte dans les rédactions? S’ils s’inquiétaient avant tout de leur avenir, ils semblent bel et bien avoir donné des idées dans d’autres journaux en dénonçant le peu de moyens dont ils disposent et la précarisation de plusieurs d’entre eux, coincés dans des CDD qui n’aboutissent pas aux embauches fermes promises.

Une colère qui a d’abord gagné leurs collègues du Monde interactif où, au contraire de ce qu’affirme Emmanuel Schwartzenberg dans son article de dimanche sur Electronlibre, le conflit n’est peut-être pas aussi désamorcé que Louis Dreyfus semble le croire. Si celui-ci affirme avoir décidé, la semaine dernière, de régulariser 18 emplois précaires et d’ouvrir le 1er juillet prochain une négociation sur les 40 collaborateurs non-régularisés, en interne, on ne se montre pas forcément satisfait de la réponse :

Il a rien désamorcé du tout.  Sur 7 CDD du Monde interactif qui venaient à échéance ces derniers jours 6 se sont transformés en CDI. Un journaliste du Post.fr a vu son CDD se termine le 28 février sans CDI par la suite comme la direction du Monde interactif l’avait promis. Ce chiffre doit contenir les 6 CDI du MIA et ceux du papier mais nous n’avons pas d’infos aussi précise de notre côté et nous ne savons pas d’où vient ce chiffre de 40. En ce moment le délégués syndicaux font les comptes mais rien qu’au Monde interactif il y aurait une petite trentaine de précaires. Donc si on ajoute ceux du Monde papier, cela dépasse surement les 40.

Calmé peut-être, réglé, rien n’est moins sûr. Car c’est la nouveauté de l’année, les rédactions ne semblent plus craindre de se rebeller ouvertement. Fait assez rare dans le petit monde des rédactions, les menaces de grèves sont désormais brandies publiquement. C’est aussi le cas de L’Equipe.fr où, comme l’expliquent les Inrocks, l’équipe numérique menace également de cesser le travail.

Les raisons de la colère ?

Des différences de salaires étonnantes d’abord, 1 000€ de moins à l’embauche pour un journaliste web par rapport à un rédacteur premier échelon papier selon l’hebdo. De quoi l’avoir mauvaise, en effet, quand on sait que L’Équipe se veut le premier site d’info du pays avec plus de 75 millions de visites en janvier et la bagatelle de 655 millions de pages vues. Mais aussi un ras-le-bol des conditions de travail et de précarisation des équipes du web… comme chez les confrères du Post et du Monde interactif.

Pour paraphraser Mon Général : on peut sauter comme un cabri en disant ” le modèle économique, le modèle économique “, mais on ne gagne rien en n’investissant pas. Le web, c’est pas de la magie !

Et ce n’est finalement pas très étonnant que ce vent de révolte souffle souvent depuis les équipes digitales. Pas parce qu’elles seraient entièrement composées d’affreux jeunes débutants gauchistes aux idées courtes, mais plutôt parce que, pour plusieurs grands médias, il est sans doute temps de passer la seconde en ligne !

Depuis plusieurs années, les équipes web font leur boulot, et plutôt bien. Elles évoluent dans un monde qui ne cesse de changer avec la ferme impression, confirmée par tous les discours qu’ils tiennent eux-mêmes, que les capitaines n’ont pas grande idée du cap à tenir. Loin de se décourager, bon nombre de journalistes en ligne ont appris à bosser dans le brouillard et avec trois bouts de ficelle. Mieux, elles en ont souvent fait un force, transformant le manque de moyens en aiguillon permanent à la créativité, l’inventivité. Et les résultats, s’ils ne sont pas parfaits, sont assez impressionnants en terme de fréquentation.

Oui, mais ces sites ne gagnent pas d’argent, où est le modèle économique ?

me rétorquera-t-on sûrement, justifiant ainsi la multiplication des CDD, les salaires souvent plus bas et le peu de moyens investis dans cette présence en ligne.

A cela, je répondrai :

1- Si le simple constat qu’on ne gagne pas d’argent suffisait à justifier le fait de ne pas investir dans un média, bon nombre de journaux papier auraient déjà dû cessé de paraître depuis longtemps.

La plupart des journaux français perdent depuis longtemps pas mal d’argent et pourtant, leurs directions continuent d’investir dedans.  Depuis 15 ans, combien de centaines de millions d’euros ont été investis régulièrement dans des rotatives ou des nouvelles maquettes pour des titres qui perdaient des lecteurs et de l’argent ? Sur le web, bizarrement, on semble s’être inventé des prudences de bon père de famille : on ne consent que des investissement minimaux tant qu’on ne voit pas poindre à l’horizon le fameux Graal du modèle économique

2- On en revient toujours à ce fameux modèle économique en ligne, après lequel tout le monde court. Et là, forcément, certains capitaines de navires ne sont pas à l’aise.

Car c’est finalement à eux que revient de trouver ou d’inventer ce fameux modèle économique. Défi de taille, certes, mais qui est pourtant bel et bien de leur responsabilité (les mauvaises langues ajouteront que cela justifie également leur salaire).
Éditeurs, directeurs de rédactions, vous avez demandé de l’audience web car c’est le modèle de développement commercial que vous avez choisi ? Vous en avez, et par millions chaque mois. Faut-il arrêter la course à l’audience? Organiser autrement la commercialisation de cette audience (lorsqu’on annonce seulement en 2011 l’arrivée de deux commerciaux dédiés aux 11 millions de visites mensuels du Post, il y a forcément de quoi se poser des questions sur ce plan par exemple)? Faut-il innover radicalement dans cette même proposition commerciale? Proposer d’autres lignes éditoriales en ligne?

Les questions sont multiples et les réponses loin d’être faciles à trouver. L’expérimentation va continuer et il n’est pas impossible qu’aucun modèle économique généralisé ne se dégage, poussant chacun à inventer le sien propre. Mais l’une des rares choses quasi certaines, c’est que rien d’intéressant n’émergera sans investir “normalement” ou en donnant l’impression aux équipes digitales qu’elles sont la 5è roue d’un carrosse qui ne sait pas où il va…

Article initialement publié sur le blog d’Erwann Gaucher

Crédit photo Flickr CC : Bruckerrlb / AlainBachelier / RomainSaillet

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http://owni.fr/2011/03/09/redactions-la-revolte-viendra-t-elle-du-web/feed/ 4
Le problème jeune, cache miséreux de la société française http://owni.fr/2011/01/10/le-%c2%ab%c2%a0probleme-jeune%c2%a0%c2%bb-cache-misereux-de-la-societe-francaise-precarite-jeuness/ http://owni.fr/2011/01/10/le-%c2%ab%c2%a0probleme-jeune%c2%a0%c2%bb-cache-misereux-de-la-societe-francaise-precarite-jeuness/#comments Mon, 10 Jan 2011 15:53:05 +0000 CSP (Comité de salut public) http://owni.fr/?p=37553 Moitié-moitié : c’est ce qu’on se dit après la lecture de cette tribune du sociologue Louis Chauvel sur la jeunesse sacrifiée. Moitié diagnostic juste, moitié à côté de la plaque concernant les responsables réels de ce sacrifice et quant aux solutions proposées. Comme si le chercheur avait commencé à voir juste sans aller jusqu’au bout de sa propre logique, en reculant en quelque sorte sur les pistes de réflexion pourtant évidentes pour sortir et le d’jeunz et les autres aussi de l’effroyable merdier dans lequel nous ont précipité trente années de délire néolibéral.

Quels sont les symptômes de ce mal-être collectif ? Les plus visibles relèvent des difficultés de la jeunesse. Nous le savons, trente-cinq ans après l’extension du chômage de masse, la jeunesse a servi de variable d’ajustement. Chômage record, baisse des salaires et des niveaux de vie, précarisation, développement de poches de travail quasi gratuit (stages, piges, free-lance, exonération de charges, etc.), nouvelle pauvreté de la jeunesse, état de santé problématique et faible recours aux soins, absence d’horizon lisible.

Pourtant, il semble bel et bien que ce ne sont pas des gouvernements de gauche – ou en tout cas de vraie gauche, s’entend bien – qui ont construit ce drame collectif, mais des « élites » toutes massivement converties à l’économie de marché ; Louis Chauvel n’en parle pourtant pas, ou en tout cas n’adopte pas cet angle et trouve à déplacer le centre du problème non sur la réalité d’une classe exerçant une férule sans partage ni pitié sur une autre, mais construit une opposition générationnelle jeunes Vs. vieux qui déplace complètement la question.

Le « jeune » est partout… et donc nulle part!

Puisque ce n’est pas seulement pour les jeunes que l’avenir est sombre, mais pour ainsi dire tout le monde, exceptés bien entendu ceux qui profiteront largement de l’aliénation généralisée en chantier actuellement. Le sociologue choisit de se focaliser sur une classe d’âge spécifique, les « jeunes », pauvres, et les oppose à des « vieux » baby-boomers censés êtres nantis et doté d’un patrimoine conséquent notamment immobilier en ayant l’air d’oublier qu’avant que d’être une histoire d’âge, la domination se construit d’abord par rapport au statut social : un « jeune » précaire et un « vieux » à retraite minable ont plus en commun qu’un « jeune » sorti de grandes écoles et qui bénéficiera du réseau des « vieux » – ses parents et leurs connaissances – pour se placer à un poste valorisé et valorisant.

La construction de l’objet « jeunes » est de plus, outre son caractère spécifiquement occidental – au Pakistan, on a pas le temps d’être « jeune », on est à l’usine à 10 ans pour fabriquer des ballons de foot -, m’a toujours posé souci dans la mesure où précisément, quand on y regarde de plus près elle n’est que cela : une construction générique fallacieuse recouvrant des réalités et des vécus extrêmement disparates. Le « jeune », en fait, ça n’existe pas. La « jeunesse », si elle est une tranche d’âge commune à une multitude ne rassemble pas pour autant ni les mêmes personnes ni les mêmes destins sociaux.

Le seul vécu commun des jeunes : subir le pire que la société a à offrir

Non pas cependant qu’il ne faille pas se préoccuper du sort de cette classe d’âge qui fait partie, c’est incontestable, de ceux qui sont et seront les plus durement frappés par la saloperie en cours et sur ce point aussi Louis Chauvel tape juste.

Par-dessus tout, une frustration générale envahit les esprits devant l’accumulation des promesses non tenues : celle du retour au plein-emploi grâce au départ à la retraite des premiers-nés du baby-boom (rapport Teulade de 1999), de meilleurs emplois par la croissance scolaire, dans un contexte où le travail seul ne permet plus de se loger. Il s’ensuit une colère, voire une haine, qui se détecte clairement dans la jeunesse de 2010 et que le mouvement sur les retraites a paradoxalement canalisée.

Haine qui malheureusement, devant l’absence de débouché progressiste, peut très bien décider de se canaliser électoralement vers ceux et spécifiquement celle qui leur fournira les réponses les plus simplistes. Puisque comme le dit Eric Coquerel du Parti de gauche, on ne peut effectivement qu’être « inquiet de voir «des gens touchés par la crise, aspirant à des ruptures et des bouleversements» mais «qui ne font plus la distinction entre la gauche et la droite». «Ils peuvent, dit-il, être séduits par une alternative cauchemardesque»
(J’aurais évidemment préféré trouver cette phrase dans la bouche d’une personne du NPA, mais il est vrai que nous sommes terriblement occupés actuellement à débattre démocratiquement dans le respect de la parole de chacun afin que toutes les tendances puissent s’exprimer…)

Là où Louis Chauvel se plante, et sévèrement, c’est par la construction de son opposition entre « jeunes » et « vieux », car même si le poids démographique d’une population vieillissante pèse de plus en plus lourd politiquement parlant, et contribue, de fait, au « caractère profondément conservateur, rentier, de la société française dans son entier » – l’ambiance de conservatisme réactionnaire qui traverse tout le corps social trouve là une grande partie de son explication : les vieux regardent TF1 et flippent et ils votent en fonction de ce ressenti…-, les grands coupables de cette situation ne sont au final pas tous les « vieux » mais certains « vieux » : ceux qui possèdent le plus de patrimoine, immobilier entre autres, et comme par hasard possèdent aussi les moyens de productions.

Quand taxerons-nous les vieux rentiers ?

Quoi de commun entre Liliane Bettencourt (88 ans), Ernest-Antoine Sellière (73 ans), Serge Dassault (85 ans), et leur équivalents en âge qui croupissent dans ces mouroirs que son les maisons de retraites ? Et si vous voulez voir une belle brochette de baby-boomers et autres sémillants quinquas – sexas pas vraiment inquiets pour leurs retraites, c’est très simple : regardez les dates de naissance du conseil exécutif du MEDEF

La véritable opposition, le noeud du conflit, il se trouve dans des vieux bourgeois contre des jeunes déclassés ET tous les autres aussi…

Du coup, cette analyse déplace également les propositions à faire pour rééquilibrer la balance puisque si on ne peut nier l’urgente nécessité d’une politique du logement ambitieuse et particulièrement volontariste – allant jusqu’à confisquer les logements inoccupés à ceux qui refusent de les mettre sur le marché en préférant spéculer dessus (oui, ça sera une atteinte atroce au droit de propriété, en effet, le totalitarisme vous dis-je), il ne semble pas sot de se dire que ces vieux là, qui effectivement possèdent tout et refusent catégoriquement désormais de même laisser des miettes – rupture du « contrat fordiste » et recherche frénétique de la maximisation des profits -, il ne semble donc pas complètement aberrant que de vouloir les mettre à contribution et ce, disons, lourdement…

C’est en ce sens que Louis Chauvel, malgré des prémisses intéressantes, se trompe d’objets de défiance, mais il est vrai que tout ce qui précède est en effet quelque peu « marxiste » en effet ; et n’est-ce pas, le marxisme et ces 15 milliards de morts, on aura pas la vulgarité de l’employer en sociologie.

Billet initialement publié sur le blog Comité de salut sous le titre Le problème n’est pas là.

Photo FlickR CC slworking2 ; The US National Archives.

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http://owni.fr/2011/01/10/le-%c2%ab%c2%a0probleme-jeune%c2%a0%c2%bb-cache-misereux-de-la-societe-francaise-precarite-jeuness/feed/ 2
Jeunes journalistes: qu’est-ce qu’on attend pour ne plus suivre les règles du jeu ? http://owni.fr/2011/01/10/jeunes-journalistes-quest-ce-quon-attend-pour-ne-plus-suivre-les-regles-du-jeu/ http://owni.fr/2011/01/10/jeunes-journalistes-quest-ce-quon-attend-pour-ne-plus-suivre-les-regles-du-jeu/#comments Mon, 10 Jan 2011 14:45:59 +0000 Morgane Tual http://owni.fr/?p=41689

[Préambule de Jean-Christophe Féraud, sur le blog duquel ce billet a été publié.]

Cela faisait un moment que j’avais envie de savoir comment les jeunes journalistes web-natives vivaient leur entrée dans une profession qui, dans les faits, n’a plus rien d’un rêve de gosse rose bonbon : précarité institutionnalisée en forme de stages et CDD à répétition, productivisme Shiva en guise de vadémécum, règne des petits chefs sur des rédactions web organisées pour le flux et rien que pour le flux, arrogance aveugle des “newsosaures” de l’ère imprimée face à la grande mutation numérique de l’information… La condition faite à cette génération surdiplômée et bien mieux formée que nous ne l’étions est indigne. Et la crise de la presse n’explique pas tout. Notre génération, celle de Gutenberg, a été jusque-là incapable de comprendre et de s’adapter aux enjeux de la révolution Internet. Et dans bien des cas, tue toute velléité d’innovation dans les rédactions en ignorant superbement ce que les jeunes ont à nous apprendre du web. Je voulais lire tout cela sous la plume d’un confrère de moins de 30 ans. Morgane Tual, qui fut ma stagiaire il y a quelques années, a relevé le gant. Et le résultat décoiffe au-delà de mes espérances. Car la “Génération Y” en prend aussi pour son grade… Lisez plutôt le billet de mon invitée.

Envie d’écrire, mais manque d’inspiration. Twitter sert à tout, même à trouver de quoi bloguer. C’est Jean-Christophe Feraud, mon ancien patron aux Échos, vieux con autoproclamé du genre qu’on aimerait voir plus souvent, qui m’a soufflé cette idée de sujet : “Jeunes/vieux journalistes, papier/internet, conflits de génération ?”.

À la lecture, j’étais moyennement emballée. J’en ai un peu marre du branlage de nouille journalistico-twitto-intello du moment. Et puis j’ai changé d’avis. Les vieux journalistes et leurs grands principes, les jeunes journalistes et leur manque de principes, j’en parle souvent, à l’oral. Alors autant l’écrire. En précisant bien qu’il ne s’agit que d’un coup de gueule, et que mes propos sur les cons, vieux ou jeunes, ne sont pas à généraliser.

Les vieux cons

La seule fois où nous avons eu un semblant de cours sur Internet, dans mon école de journalisme, c’est un vieux type, une “pointure”, qui est venu nous faire la leçon. Globalement, j’ai toujours trouvé cela étrange que des personnes de soixante berges viennent nous apprendre la presse, alors qu’ils l’ont fichue en l’air. Ils nous lèguent des médias au bord de la faillite, un mépris généralisé (et bien mérité) des citoyens à notre égard, et nous enseignent la bonne vieille méthode pour continuer.

C’est d’autant plus amusant quand un journaliste d’un certain âge vient nous faire la leçon sur Internet. Ces types, qu’on a balancés à la tête de rédactions web parce qu’ils avaient “du bagage” et l’audace d’avoir ouvert un compte Facebook en 2007, ont tout appris dans des colloques. Ils sont généralement aussi sensibles au web qu’un ornithorynque confronté à une Playstation. Ils nous racontent avec une certitude insensée qu’écrire pour le web, c’est écrire court. C’est mélanger du texte avec de la vidéo et du son. Sinon, ce n’est pas “web”. Encore moins “web 2.0″.

Pas d’accord. En fait, personne ne sait ce qu’est le journalisme web, et finalement, c’est aussi bien. Ce qui est valable aujourd’hui ne le sera plus demain. Nous pédalons tous dans la semoule/choucroute/caviar et, confidence pour confidence, j’adore ça. Chercher à établir des “règles”, des “pratiques”, peut-être que c’est finalement cela qui est anti-web. Néanmoins, qu’un type de 40, 50, 60 ans – ou de n’importe quel âge – ne détienne pas toutes les vérités sur la publication en ligne n’est pas choquant en soi. Ce qui l’est, en revanche, c’est le manque de curiosité. Pendant ces cours, il ne viendrait pas à l’esprit du journaliste-professeur de nous interroger sur nos pratiques, tout occupé qu’il est à se faire mousser devant des jeunes admiratifs. On l’a vu, les vieux journalistes ne sont pas à une contradiction près. Entre le discours et la pratique, il y a un grand canyon.

Entre eux, dans les conférences où ils interviennent, tous tiennent le même discours : les jeunes sont formidables. “Nous avons tout à apprendre des digital-natives, ils ont le web dans le sang, nous sommes très à l’écoute des jeunes et des nouvelles pratiques”. Étrangement, dans les nombreuses rédactions que j’ai fréquentées, personne ne m’a jamais demandé mon avis de (presque) digital-native. Tu peux marquer HTML en capitales rouges sur ton CV, tout le monde s’en tamponne. Pour parader dans des séminaires en expliquant que les jeunes sont formidables, il n’y a aucun problème.

Mais la réalité, c’est que les jeunes moisissent dans des rédactions pourries, payés que dalle, parfois ignorés, rarement remerciés, pour des stages aux limites de la légalité, à bosser comme des bêtes à pondre de la dépêche minable jusqu’à pas d’heure. La remise en question, ce n’est bon que pour les conférences. En vrai, on attend sagement la retraite, en glorifiant le temps d’avant, en accusant le web de tous les maux de la presse, en évitant soigneusement de se sentir responsable. Après nous, le déluge.

Les jeunes cons

Heureusement, la jeune génération est là pour prendre le relais. Non ? Non. La génération Y, c’est surtout la génération plan-plan. Aussi bien pensants que nos aînés. Sauf que les vieux, eux, ont au moins le mérite d’avoir été jeunes une fois dans leur vie, en essayant de tout foutre en l’air dans les années 60-70. Aujourd’hui, on fait du journalisme pour être reconnu socialement, et surtout pas pour faire évoluer le métier. On rêve de parler dans le poste avec le même ton cloné, d’écrire dans des journaux prestigieux et, si on a de la chance et la belle gueule qui va avec, de faire de la présentation à la télévision, summum de la gloire. Quitte à reproduire éternellement le même modèle qui, on le sait désormais, est voué à l’échec. Bref, réinventer le journalisme, très peu pour nous. Dorénavant, les rares à lancer de nouveaux projets ambitieux ont souvent passé la cinquantaine. Et le seul à s’être montré impertinent comme nous, jeunes cons, devrions l’être si nous remplissions notre rôle social, est un vieil anar octogénaire. Aujourd’hui, lancer un média est pourtant devenu techniquement et financièrement bien plus accessible qu’auparavant. Nous disposons d’une liberté immense. D’un espace de jeu illimité. Et nous n’en prenons pas possession. Les quelques journaux lancés par des jeunes motivés, même s’ils sont souvent d’une remarquable qualité, restent néanmoins d’une sagesse désespérante.

Nous sommes la génération CPE. Notre combat, ce n’était pas de changer le monde. Non, nous, tout ce qu’on voulait, c’est un putain de CDI ! En 1968, les jeunes voulaient abolir le travail et le consumérisme. Nous on veut un contrat afin de pouvoir s’acheter une bagnole à crédit. La sécurité. le confort. Surtout ne rien changer. Quid des “digital-natives” ? Dans ce contexte d’insécurité complète du marché de l’emploi, le web est devenu une immense opportunité pour se faire connaître, hors des sentiers-battus du CV à papa. Le “personal branding”, dépasser les mille followers sur Twitter, se faire inviter dans des soirées parisiennes VIP, chics et underground est devenu un but en soi.

Nous passons beaucoup de temps sur ces futilités, nous éloignant chaque jour davantage du reportage de terrain, de l’enquête et, surtout, des gens. De tous ces gens qui ne savent pas ce qu’est le web 2.0, encore moins ce qu’est Twitter, qui s’en foutent et qui, en plus, ont sans doute bien raison.Qu’est-ce qu’on attend pour ne plus suivre les règles du jeu ? Qui prendra la suite de Siné, pour chier dans la colle, à notre façon ?

Billet initialement publié sur Mon écran radar

Image CC Flickr squidtestes et infomatique

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http://owni.fr/2011/01/10/jeunes-journalistes-quest-ce-quon-attend-pour-ne-plus-suivre-les-regles-du-jeu/feed/ 33
Modernisons l’emploi : abolissons les droits de l’Homme ! http://owni.fr/2010/11/11/modernisons-lemploi-abolissons-les-droits-de-lhomme/ http://owni.fr/2010/11/11/modernisons-lemploi-abolissons-les-droits-de-lhomme/#comments Thu, 11 Nov 2010 13:43:59 +0000 Actuchomage http://owni.fr/?p=37158 Article initialement publié sur :

sous le titre Et si on supprimait les Droits de l’Homme, tout simplement ?

Pourquoi s’emmerder avec des vieux textes qui nous autorisent à donner des leçons aux autres sans balayer devant notre porte, ou des conventions internationales qu’on signe pour ne pas les respecter ?

Telle est la question qu’a posé Patdu49 au Médiateur de la République

Boutade ? Oui, bien sûr. Pas question de revenir sur ces principes de civilisation dont nous sommes si fiers et qui, parfois, servent encore de garde-fou.

Mais au quotidien, quand on voit comment les élites politiques et économiques bafouent nos principes fondateurs en toute impunité, instillant ces multiples trahisons dans nos esprits jusqu’à les transformer en norme de société, quand on s’aperçoit que même le citoyen lambda ne s’offusque plus des coups de canif répétés dans notre contrat républicain, notre Constitution, nos chers Droits de l’Homme et nos conventions internationales, comment, au dégoût, ne succèderait pas un brin de dérision ?

Le travail : « devoir » des travailleurs mais pas des employeurs

L’alinéa 5 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, repris intégralement dans la Constitution du 4 octobre 1958, affirme que « chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ». Or, s’il est clair que travailler est un « devoir » — il est surtout, pour la majorité des actifs, l’unique moyen d’assurer sa subsistance —, le droit constitutionnel à « obtenir un emploi » est le seul à ne bénéficier d’aucune portée juridique dans un contexte où l’emploi est l’objet de destructions massives. En clair, si le chômeur a le devoir de travailler (ce que la loi n°2008-758 du 1er août 2008 lui rappelle), qu’il se démerde pour obtenir un emploi qui lui permette de vivre, puisque l’obligation de résultat se heurte à la non-obligation de moyens : le chômeur se doit toujours de travailler, tandis que l’Etat et les entreprises ont le droit de continuer à détruire des emplois et de ne plus en créer.

N’en déplaise à ceux qui voudraient en finir avec la protection sociale, l’alinéa 11 du même texte précise que « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler, a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ». Cependant, les 8 millions de Français qui vivent en dessous du seuil de pauvreté, les chômeurs en fin de droits qui survivent avec l’ASS, le RSA ou rien du tout, apprécieront le caractère « convenable » et hautement constitutionnel de ces « moyens d’existence »

Le 1er alinéa de l’article 23 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 affirme le « droit au travail » et, aussitôt après, celui à la « protection contre le chômage » : « Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables et satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage ». Les chômeurs non indemnisés, ceux que l’on oblige à accepter des emplois indignes, déclassés ou des formations non désirées sous peine de sanctions/radiation apprécieront également.

L’article 25 du même texte précise que « toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté ». Pourtant, ici ou ailleurs, non seulement on s’assoit sur les conséquences de la crise — les chômeurs sont responsables de leur situation et, paraît-il, s’y complaisent —, mais il est question de renier ces principes fondateurs.

Le travail gratuit pour les chômeurs en Angleterre, « une excellente idée » pour Apparu

Voyez Benoist Apparu qui estime, avec un naturel confondant, que l’obligation faite aux chômeurs de longue durée britanniques de travailler gratuitement pour la collectivité constitue, en effet, « une excellente idée » car « mieux vaut travailler pour rien que de ne rien faire du tout »… Mais oui : il faut aider ces profiteurs de « l’Etat-providence » à « se réadapter au travail » ! Faute d’emplois rémunérés, profitons de la crise pour les faire bosser à l’œil (et laissons la Finance dégager des profits sur le dos des états endettés).

Or, ce petit secrétaire d’État oublie que la Grande-Bretagne, à l’instar de la France et de l’Allemagne (pays des jobs à 1 €), a signé le 25 juin 1957 la Convention sur l’abolition du travail forcé qui, dans son article Premier, précise :

« Tout Membre de l’Organisation internationale du Travail qui ratifie la présente convention s’engage à supprimer le travail forcé ou obligatoire et à n’y recourir sous aucune forme :
a)en tant que mesure de coercition ou d’éducation politique ou en tant que sanction à l’égard de personnes qui ont ou expriment certaines opinions politiques ou manifestent leur opposition idéologique à l’ordre politique, social ou économique établi
b) en tant que méthode de mobilisation et d’utilisation de la main-d’oeuvre à des fins de développement économique [valable pour les contrats aidés]
c) en tant que mesure de discipline du travail [valable pour les chômeurs anglais]
d) en tant que punition pour avoir participé à des grèves
e) en tant que mesure de discrimination raciale, sociale, nationale ou religieuse. [on peut retenir la discrimination sociale]

Benoist Apparu n’est pas le seul a être frappé d’amnésie : nombre de politiques, de droite comme de gauche, et de citoyens ordinaires ne s’indignent pas de la scandaleuse proposition du gouvernement britannique. Certains estiment même qu’il faudrait importer cette mesure quasi esclavagiste dans la patrie des Droits de l’Homme !

Qu’ils se rassurent, le principe existe déjà : Pôle Emploi propose des EMT (évaluations en milieu de travail) et des AFPR (actions de formation préalable au recrutement), soit des mini-formules de travail gratuit pour les employeurs qui ne veulent plus s’emmerder avec une période d’essai qu’il faut, hélas, rémunérer.

Enfin, certains estiment qu’il faut en finir avec ces gens qui sont payés pour ne pas travailler. Qu’en pense Christine Lagarde qui, en tant qu’élue du 12e arrondissement de Paris, touche 4.000 € brut par mois en faisant siège vide depuis deux ans et demi ?

Rompre avec les valeurs démodés de la justice et de l’égalité

Comme le propose notre ami Patdu49, finissons-en avec ces textes qui datent de Mathusalem et tous ces organismes qui les défendent mais ne servent à rien. Nous sommes au XXIe siècle, celui du tout-libéral, du tout-décomplexé, de la “rupture” : des valeurs du passé faisons table rase !

Tiens, par exemple, au lieu de conserver cette devise éculée sur le fronton de nos institutions — Liberté, Égalité, Fraternité — qui ne colle plus vraiment à la France d’aujourd’hui, si on mettait à la place :
• Corruption, Inégalité, Répression
• Travail, Famille, Patrie
• Copinage, Corporatisme, CAC40
• Stock options, Parachutes dorés, Jetons de présence, Rentes Immobilières ?

Ça en jetterait, non ?

Dans la foulée, enfin débarrassés de nos vieux préceptes, licencions un maximum de salariés, laissons-les mariner au chômage pendant un an minimum, et reprenons-les ensuite pour effectuer gratuitement des travaux d’intérêt général !

FlickR CC Sunny Ripert ; Des Temps Anciens ; George Eastman House.

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http://owni.fr/2010/11/11/modernisons-lemploi-abolissons-les-droits-de-lhomme/feed/ 14
Chômeurs en fin de droits : Le compte à rebours continue pour 600 000 personnes ! http://owni.fr/2010/01/20/chomeurs-en-fin-de-droits-le-compte-a-rebours-continue-pour-600-000-personnes/ http://owni.fr/2010/01/20/chomeurs-en-fin-de-droits-le-compte-a-rebours-continue-pour-600-000-personnes/#comments Wed, 20 Jan 2010 08:40:50 +0000 chomeur93 http://owni.fr/?p=7116 Si, comme nous vous l’expliquions hier, Xavier Bertrand a annoncé vouloir mettre en avant le thème de l’emploi pour les prochaines élections régionales, en déclarant : … / … Tant pis si l’emploi est généralement plus considéré comme relevant d’une politique nationale que régionale: “Pour ces élections, nous sommes dans l’opposition…. / …

Il s’est fait, lors de cette déclaration, d’une discrétion de rosière, sur les chômeurs qui vont se retrouver en fin de droit en 2010 !
Et pourtant : “Plus d’un million de demandeurs d’emploi devraient arriver, en 2010, en fin de droits. Un nombre supérieur aux 800 000 personnes en période “ordinaire”. A peine quatre de ces chômeurs sur dix devraient bénéficier de la solidarité nationale, par le biais de l’allocation spécifique de solidarité – ASS, un minimum social pour ceux qui ne bénéficient plus d’indemnisation chômage – ou du revenu de solidarité active (RSA), ex-RMI. Les autres n’ont droit à aucune aide” – Source Le Monde

compte-a-rebours
Donc, dépasser le seuil de la précarité, pour atteindre celui du déclassement suprême : La misère

Le déclassement, c’était LE livre qu’il fallait lire : ” La peur du déclassement. Une sociologie des récessions” Ecrit par Eric Maurin, qui proposait un “nouveau regard” sur le sentiment de plus en plus ressenti du déclassement chez les français.

Denis Clerc d’Alternatives Economiques nous avait donné lors de sa sortie une analyse critiquede l’ouvrage : ” … / … Celui qui perd son emploi stable risque fort de stagner dans le chômage ou de devoir renoncer à un emploi de qualité. Ceux qui sont en emploi temporaire sont confrontés à la précarité et supportent l’essentiel des ajustements, tandis que ceux qui arrivent sur le marché du travail jouent les paratonnerres ou les supplétifs, surtout s’ils ne sont pas pourvus en diplômes … / … La peur du déclassement est donc le prix à payer dans une société qui privilégie les statuts protecteurs. Comment la réduire? Certainement pas en supprimant ces derniers, mais en réduisant les inégalités qu’ils engendrent … / … ” (Voir aussi interviews d’Eric Maurin en vidéo sur laRépublique des idées et analyse du sociologue Camille Peugny )

Depuis, la situation du chômage a empirée et la durée nécessaire pour en retrouver un travail en cas de perte s’allonge de façon dramatique. Nous avons atteint un point ou ne peut plus parler de : “déclassement” mais de : “relégation

Et c’est d’autant plus grave, que le gouvernement continue à revendiquer haut et fort son débat sur l’identité nationale. Quelle identité a t-on, monsieur Besson, lorsqu’on a la relégation comme avenir de court terme ?

Néanmoins, au gouvernement, on cherche à minimiser les difficultés et on ne craint pas les déclarations à caractère mensonger !

Ainsi, Laurent Wauquiez, interviewé par le Parisien et qui déclare : “Toutes les offres d’emploi devront être pourvues” sous entendu : même celles dont la qualité est jugée insuffisante ou douteuses par le nombre d’heures ou les conditions proposées !

Le Parisien : Les chômeurs se plaignent d’être mal suivis alors que le gouvernement avait promis un accompagnement personnalisé…

Laurent Wauquiez : Pour les gens licenciés, on est arrivé à avoir un vrai suivi personnalisé avecun conseiller pour 60 personnes maximumPour les autres, la moyenne est d’un agent pour 95. On doit faire mieux. C’est pour cette raison qu’on a mis des renforts en plus.
Pour ceux qui comme l’auteur de cet article ont connut la période de “convention de reclassement personnalisée” (CRP), nous sommes en mesure d’affirmer que le nombre de personnes par conseiller dépassent les 90 et dans certain cas atteignent les 120 !

Afin de gérer ce surnombre, les conseillers CRP fonctionnent suivant un principe de mutualisation. Lorsqu’un conseiller dépasse les 90 personnes, les nouveaux dossiers sont affectés à un conseiller moins “chargé”. Ainsi, une personne rattachée au pôle emploi de Pavillons sous Bois (93) peut se retrouver géré par le pôle emploi du Raincy ou de Saint Denis. Et ainsi de suite ….

En ce qui concerne les autres, le nombre de personnes est (preuve à l’appui) de 300 personnes suivies par conseiller en ce qui concerne la conseillère du rédacteur du présent article !

Mais pour ceux qui : “ devraient arriver, en 2010, en fin de droits” le “volontarisme” proclamé de Laurent Wauquiez ne servira à rien puisque personne ne sait exactement ce qu’ils vont devenir.

Car, le principe de la patate chaude ne fait que commencer !

UNEDIC

Le président du régime d’assurance-chômage (Unedic), Geoffroy Roux de Bézieux (Medef), est sorti de sa réserve jeudi 14 janvier, déclarant sur le site Internet du magazine Capital que “c’est à l’Etat et non à l’Unedic de gérer le problème des chômeurs en fin de droits” – Source Le Monde

Gouvernement

Le 14 janvier, à l’Assemblée nationale, lors de la séance des questions au gouvernement, le ministre de l’industrie, Christian Estrosi, semblait minimiser le problème, justifiant la hausse par “un effet mécanique”. Pour “rassurer”, il précisait que “les personnes en fin de droits ne se retrouvent pas sans ressources : elles peuvent évidemment bénéficier du Revenu de solidarité active (RSA) et, pour celles qui ont de l’ancienneté dans l’emploi (cinq ans), de l’Allocation de solidarité spécifique (ASS) “. Il omettait de préciser que les conditions d’accès à ces mesures de solidarité nationale excluaient quelque 600 000 personnes ” – Source Le Monde

UMP

Du côté du “gentil” Xavier Bertrand, on conteste les chiffres et on se contente de suggèrer de créer : “ un dispositif spécial pour aider les chômeurs en fin de droits à retrouver un emploi. L’ancien ministre du Travail ajoute … / … ” Pour les chômeurs en fin de droits, qui seront sans doute moins nombreux que le million pronostiqué par l’Insee, pourquoi ne pas créer un dispositif spécifique pour les ramener vers l’emploi ? Il existe bien des primes versées aux employeurs pour certaines embauches de jeunes” – Source News Assurances

Parti Socialiste

Laurent Fabius sur son blog et le Parti Socialiste font les propositions suivantes : ” On nous a fait croire qu’on allait réellement taxer les bonus des banquiers. C’est de la poudre aux yeux. déclare Laurent Fabius. … / … Je demande que l’on reprenne la proposition des socialistes : une taxation de 10%. Un million de personnes vont arriver en fin de droits cette année. C’est colossal. Il faut augmenter la durée d’indemnisation du chômage. La taxation des banques pourrait contribuer à financer cette mesure

Judicieux, car comme nous l’explique le Nouvel Obs :

” … / … Le journal Le Monde a calculé que les banques françaises et les filiales françaises de banques étrangères verseraient en mars environ un milliard d’euros à leurs traders, l’équivalent de ce que touchent 62.000 smicards pendant un an. Le bonus moyen par trader, dit le quotidien, s’établit à 285.700 euros par trader, soit 17 fois le smic annuel. … / …”

mais peu réaliste, puisqu’on apprend que : ” Le gros des équipes de trading des banques françaises est cependant basé à … l’étranger, notamment à Londres, où l’impôt français ne s’applique pas

Enfin, bref, des intentions, des déclarations, mais rien pour arrêter le compteur de ceux qui vont quitter les chiffres du chômage et plonger dans la misère et l’isolement !

Et les syndicats de salariés direz-vous ?

Les organisations syndicales majeures au lieu de faire cause commune, ont, semble t-il d’autres préoccupations plus terre à terre, comme nous l’expliquent Les Echos :

” Décidément, le mois de janvier est propice aux psychodrames syndicaux. Il y a un an, la nouvelle convention d’assurance-chômage, qui fixe les conditions d’indemnisation pour les demandeurs d’emploi et qui doit être renégociée à la fin de l’année, avait failli ne pas voir le jour. … / … Cette fois-ci, le suspense porte sur l’identité du président de l’Unedic, qui sera élu par son conseil d’administration le 29 janvier. C’est un syndicaliste qui doit succéder au représentant du Medef Geoffroy Roux de Bézieux. Mais lequel ?

La CFDT n’a pas l’intention de céder le poste qu’elle occupe depuis 1994. Son numéro un, François Chérèque, a annoncé jeudi qu’elle présentera Gaby Bonnand. … / … Force ouvrière pourrait lancer dans la course Stéphane Lardy, son secrétaire confédéral chargé de l’emploi, qui siège à l’Unedic, même si l’organisation n’a pas signé la nouvelle convention. … / … L’idée de reprendre pied dans l’assurance-chômage travaille Jean-Claude Mailly depuis son arrivée à la tête de FO. … / … La confédération de Jacques Voisin affirme que « si FO présente un candidat, [elle] le soutiendra »… / … Si elle s’affiche avec la CGC pour éviter de choquer ses troupes, compte tenu de l’anti-cléricalisme historique de FO, la centrale chrétienne a bel et bien fait de son rapprochement avec Force ouvrière son axe de travail privilégié, compte tenu du recentrage de la CGC sur l’encadrement. La présidence de l’Unedic serait une première occasion de marquer cette alliance. … / … ”

Hallucinant de penser que pendant que chacun parle, s’évalue et suggère, que : Le compte à rebours continue pour 600 000 personnes !

Vous pouvez commenter sur Slovar les Nouvelles

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http://owni.fr/2010/01/20/chomeurs-en-fin-de-droits-le-compte-a-rebours-continue-pour-600-000-personnes/feed/ 1
L’autodétermination du hamster dans sa roue http://owni.fr/2009/09/01/lautodetermination-du-hamster-dans-sa-roue/ http://owni.fr/2009/09/01/lautodetermination-du-hamster-dans-sa-roue/#comments Tue, 01 Sep 2009 07:14:08 +0000 Agnès Maillard http://owni.fr/?p=3085

Marche ou crève. Voilà le monde dans lequel nous vivons. Voilà le monde dont on a hérité et probablement celui que nous allons léguer à nos enfants. Pas de quoi pavoiser.

Marche ou crève. Un pas en avant, dix coups dans ta gueule, tu encaisses le recul et tu recommences. Il faut un moral de vainqueur pour survivre dans un monde de perdants. Marche ou crève. Tu y crois, tu te bats, tu te défonces, d’ailleurs, même si tu n’y crois pas, tu fais au moins semblant, au moins la chaleur du troupeau que l’extrême solitude du sage. Bêlons en chœur, peut-être que le loup bouffera le mouton d’à côté, peut-être même qu’en fermant très fort les yeux, tout cela cessera d’exister et la porte du placard se refermera sur sa parade monstrueuse qui a envahi toute la chambre et qui déferle maintenant dans le couloir.
Marche ou crève. Ou faire dans l’originalité, choisir son rythme. Je trottine, je cours, je brasse et je pédale. Je pensais avoir changé d’univers physique et mental, je n’ai fait que m’adapter à la donne en restant dans le mouvement. Ma seule marge de manœuvre, c’est la vitesse que j’imprime à la roue que mes efforts colossaux font tourner mollement sur place.
Marche ou crève. Courir pour oublier qu’on ne va nulle part. Pédaler pour démultiplier le pas perdu. Nager pour ne pas sombrer corps et âme. Ni médaille, ni trophée, ni podium, ou alors tous bien serrés sur la dernière marche. Ni fleurs, ni couronne. Non plus. Rien que l’instant et l’écho de ton souffle court pendant que tu t’échines à avancer. Avancer. Comme des pantins. Les figurants d’un mauvais film qui emmerde tout le monde et dont personne ne veut connaître la fin.
Marche ou crève. K.O. debout, tu t’es encore vautré. Est-il humainement possible de se bouffer autant de portes sans jamais s’enkyster dans le bois du panneau ? Encore une couleuvre à avaler, ton gosier est plus souple et serpentaire qu’un alambic, tu ne peux même plus déglutir ta propre honte, ton ultime négation de toi. Envie de laisser tomber, de baisser les bras.
Et puis quoi ?
Crève dans le fossé, la gueule ouverte. Mais fais-le en silence, pour ne pas troubler la foulée intime et recueillie des autres coureurs de fond. Crève, mais crève donc ! le surnuméraire, l’échappé du dernier rang, le boulet de service, toi, le putain de concurrent. Pas de voiture-balai dans ce tour de force-là, pour ce tas de forçats las. Ce n’est même pas la loi de la jungle, les animaux n’ont jamais été aussi cons. Demain attend pourtant l’ultime ressource du faible de ce soir. C’est la leçon que nous ignorons, que nous méprisons sans cesse et c’est bien là notre perte.

Pas de consolation pour les perdants, ni repos, ni soulagement. On les finira à coups de saton dans le caniveau, ces crevures!
Alors, tu ravales ta peine, tes espoirs et tes colères, tu bandes ces muscles dérisoires que la permanence de la lutte t’a sculptés et tu repars vers le mirage suivant, sans le voir, sans y croire, mais parce que tu n’as, finalement, pas le choix.

Balancé dans une fureur froide une nuit sans sommeil.

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