Hacker Space Festival: “on ne peut pas lutter contre les idées dont le temps est arrivé”

Le 26 octobre 2010

Ce week-end, les fans de bidouille ont rendez-vous au /tmp/lab, le hacker space de Vitry-sur-Seine (94), pour la troisième édition de leur festival. Une nouvelle édition transdisciplinaire.

“Réaliser tous ses désirs, c’est épanouissant, non ?”, s’amuse Alexandre Korber, un des membres du /tmp/lab qui organise le troisième Plastic Hacker Space Festival à Vitry-sur-Seine (94), dans les locaux du premier hackerspace parisien. Car telle est l’ambition affichée de ce festival qui réunira de vendredi soir à dimanche tard dans la nuit, les adeptes du DIY (Do It Yourself) :

“All the ways to realize all your phantasms”

Cet accomplissement, contrairement à ce que les non-initiés pensent parfois, est parfaitement légal et ne passe pas forcément par du trifouillage de machines. Il s’agit davantage d’une philosophie générale de vie transdisciplinaire :

Nous sommes dans une démarche d’ouverture au public, de décomplexion des gens face à la technologie et d’exploration des pratiques et domaines, qu’ils soient en lien ou non avec les nouvelles technologies

détaille Philippe Langlois, membre fondateur du /tmp/lab. Un programme éclectique donc, qui mêle conférences et ateliers : de l’art avec des installations sonores, des performances, des projections de films, du droit – et oui la loi se hacke -, de l’urbanisme, la question des genres sexuels, etc. ” Un mix qui attirera un public varié, “des chercheurs du CNRS comme des lycéens, des chômeurs, des entrepreneurs, des ingénieurs, des gens qui ne se sont pas forcément dans le domaine informatique. Et il y a plus de femmes qui organisent le PHSF cette année que d’hommes, nous essayons de ne pas être dans ce biais masculin”, tient-il à préciser.

S’il n’est pas nécessaire d’être adepte des technologies, “le noyau dur, c’est l’esprit Fab Lab“, poursuit Alexandre Korber. Loin des longs process de réalisation de l’industrie classique, les Fab Lab sont des ateliers couplant machines et ordinateurs pour fabriquer des objets en mode agile. On pourra ainsi voir des réalisations du projet Usinette, qui est l’équivalent version objet du hackerspace. Par exemple, RepRap, une imprimante 3D low cost, sous logiciel libre bien sûr, entrera en action. Cela vous semble abstrait ? Et bien sachez que cet outil peut servir à concevoir… un sex-toy.

Si les activités présentées ne risquent pas d’envoyer leurs auteurs en prison, il émane tout de même un parfum potentiellement dérangeant. Philippe Langlois détaille :

On ne dit pas non plus que tout notre discours est accepté. Quand tu vois que le sampling est encore interdit dans la création musicale, oui effectivement, on se bat contre certaines idées rétrogrades. Nous vivons dans un pays où Hadopi est promulguée alors qu’on sait que c’est inefficace, il faut quand même dire les choses. Le hacking n’est pas nécessairement à la marge, il se fait à la marge mais il définit des objets, des concepts et des manières de faire et d’utiliser la technologie pour qu’ils deviennent grand public.

Le hacking de façon générale a une dimension politique en ce que sa pratique interroge notre société, et remet parfois ses fondements en cause. Fabriquer soi-même (plutôt qu’acheter), l’un des credo du hacking, constitue une démarche éminemment politique qui renvoie entre autre à la question de la (dé)croissance, du développement durable, etc. Une conférence creusera particulièrement cet aspect.

Ce qui fait tout l’attrait du hacking est que cette portée politique peut très bien cohabiter avec le ludique. “On peut traiter des sujets sérieux, voire grave sans pour autant être embêtant”, rappelle Philippe Langlois, citant les Yes Men, ces activistes maniant l’art du “prank” (canular, en bon français).

Le succès des deux précédentes éditions du PHSF et l’activité des hackers français montre que la France se met au bidouillage, en dépit d’une culture a priori moins favorable à son développent, selon Philippe Langlois :

Tous les pays du monde sont des terres de hackers, après c’est son acceptation en temps que changement social qui varie selon les pays. La France étant dans une tradition des grandes écoles, si tu n’es pas sorti de l’école, tu n’as pas le droit. Si on attend le changement des gens qui ont tout et ne veulent rien changer, cela ne fonctionne pas trop. Alors naturellement, la France n’était pas un lieu où les innovations apportées par cette nouvelle lecture étaient appréciées. Après, on ne peut pas lutter contre les idées dont le temps est arrivé.

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Bonus : si votre mère ne comprend pas ce qu’est le hacking, Dédée, Dolorès et Gisèle donnent leur définition :

> Le site du Plastic Hacker Space Festival

> Le site du /tmp/lab

> Affiche Denis Mareau ; image de une CC Flickr

> Illustration CC FlickR opacity

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